Sous ses airs innocents, le couple d’acrobates de la pop française dépeint le portrait d’une jeunesse en pleine crise. Un premier album coup de poing d’amour.

« Laisser place aux sentiments étranges, qui nous traversent de haut en bas ». Les paroles du titre d’ouverture de Carrément Carrément, premier long des Pirouettes, annonce les couleurs qui suivent : le rouge sexuel, le noir f(l)ou et mais surtout le blanc de l’espoir. Au final, un tableau musical à la fois simple et complexe, réjouissant et mélancolique, doux et violent.

Vickie Chérie et Léo Bear Creek, vingt et quelques petites années, racontent leur génération, celle qui a grandi naïvement avec Facebook et est devenue adulte dans une désillusion nourrie par Tinder, les théories du complot et les attentats. Alors, quand les repères manquent, il reste l’amour, disséminé tout au long des douze titres qui composent l’album, l’un lui étant même consacré (Amoureux). Un amour idyllique, passionné (Soleil rare), charnel (Jouer le jeu), partout, tout le temps.

 

Ces sentiments amoureux, sous toutes leurs formes, n’ont jamais été aussi humains face à une société divisée, comme le rappelle le titre L’escalier, prétendant au manifeste de cette génération indécise et agitée, les « millennials ». Puis vient le temps de l’apaisement avec le nostalgique 2016 – en ce temps là, une balade chaude et lumineuse qui apporte la touche d’optimisme qu’il manquait à l’album. Le souvenir futur de leur jeunesse, de la nôtre, qui chante pour célébrer l’insouciance.

Carrément Carrément est à l’image du parcours du duo parisien, parfaitement illustré dans le titre Je nous vois. Après deux EP en parallèle de leurs projets respectifs (les Arts Décoratifs pour Vickie, le groupe Coming Soon pour Léo) et de leurs projets communs, notamment dans la mode, The Pirouettes font un grand pas avec cet album à la production et aux arrangements soignés. Beaucoup d’influences, de la pop 80’s aux accents rap 2016, qui lui donne une intemporalité moderne. Le titre, Carrément Carrément, n’est pas le seul à avoir été doublé : deux musiciens, un batteur et un bassiste, ont rejoint le duo pour une tournée dont les deux dates parisiennes affichent complètes. Carrément carrément mérité mérité.

Carrément Carrément (Kidderminster), disponible
photo : Sarah Balhadere