Longtemps à l’ombre de ses voisins nordiques, l’électro-pop hexagonale se décomplexe et ose poser la belle langue sur un fond synthétisé. Focus sur les sonorités légères de la « french-touch ».

La langue de Molière a longtemps perdu la bataille face à l’institution musicale britannique, les textes sont qualifiés de « naïfs » et ne trouvent grâce qu’au sein de la chanson française dans ce qu’elle a de plus Joe Dassin. Et pourtant ! Depuis quelque temps, l’électro-pop retrouve sa place au soleil, alimentée par une glorieuse bande d’artistes qui mérite qu’on lui porte attention.

Prendre la pop à la source.

C’est avec le duo Ellie & Jacno que les années 80 découvrent combo gagnant de la voix perchée sur les notes de synthé, moins agressif que les sons d’un Carpenter, la musique française se crée alors une atmosphère juvénile et légère, entre l’envie de danser et celle de rire. Encore décriée, il faudra attendre un peu pour que la volatilité se popularise…

Ô toi Tellier !

C’est en 2001 que la patron de nouvelle électro-pop française ouvre la voie à ce style, consacré en 2004 par sa Ritournelle, comme une sorte de ballade, on découvre de nouveaux horizons devenant indispensables à toute oreille qui se respecte. Comment expliquer l’engouement provoqué ?

« A la France, nation légère, l’empire des airs »

Si l’électro-pop française plaît autant c’est parce qu’elle nous va bien. Le français est prétentieux et peut affirmer que sa musique est sexy, (merci Paradis). C’est parce que le rythme est décalé, entre l’Hotel Costes et Taxi Girl, renouant avec l’amour des mots et des phrases bien construites, susurrées au bon moment.
Mais c’est aussi parce qu’elle est drôle, qu’elle ne veut souvent rien dire et pourtant, comme un poème de Rimbaud, parle à chacun. On ne revient plus sur les multiples raisons d’aimer Flavien Berger mais l’électro-pop c’est aussi ça : assembler le quotidien et l’improbable sur un fond planant et dansant.

Distinguer le Niais du Frais.

La magie de cette musique c’est qu’elle est « home made », « DIY » et tout ce que vous voudrez de termes branchés. Les DJ/chanteurs/compositeurs sont de plus en plus jeunes et ça fait un bien fou, comme un vent nouveau sur l’industrie musicale. Parfois qualifiée de « trop parisienne » par ses textes (The Pirouettes– « Autoroute Opéra ») il faut pourtant admettre qu’elle résulte d’un phénomène national, d’une envie partagée, comme le Rock N Roll à son heure de gloire.

Parce que Thatcher ne l’aimait pas

En 1988 cette bien belle figure décide d’interdire les rassemblements autour de la musique répétitive. C’est grâce à elle que les plus grandes raves sont organisées et que cette musique s’invite dans les cœurs. L’électro-Pop se fait ainsi dissidente à sa façon ( St-Germain, Cassius…). On assiste à la transition du nouveau « populaire » : l’électro français trouve ses lettres de noblesse ( 1er prix des Victoires de la Musique décerné à Laurent Garnier en 1998) et se mêle rapidement à la pop française. Le mariage fonctionne et ce nouveau genre remporte une première bataille, le début d’une longue série.

… Et en plus elle n’est pas snob

Forte de ses influences, elle permet de revoir nos classiques et s’en inspire si bien. De quoi faire rire les générations précédentes, il faut admettre que c’est aussi un moyen de sauvegarder une part de culture (La Ballade de Jim, Paradis/Alain Souchon).
Afin de prêcher ceux qui ne seraient pas encore totalement converti, je vous invite à plonger dans une scène du dernier Xavier Dolan où Exotica magnifie là- déjà – jolie Une miss s’immisce de Françoise Hardy.

Autant de raison de demeurer ou de devenir adepte de ces notes à la fois simples et innovantes, comme une invitation au voyage dans un espace-temps qui ne cesse de se renouveler et de s’enrichir.

Nous vous avions également concocté une playlist des 40 artistes francophones à suivre de (TRES) près à écouter ici : http://listnup.fr/2016/06/08/pop-francaise/

Emma Ferey