Après un top espoir concernant cette dernière édition du festival parisien, nous revenons sur ces 3 jours de musique, de frites et de surprises de Rock En Seine 2017, pour ceux qui seraient passés à côté…

Vendredi, 16h50:

Se frayant un chemin dans la foule après une sortie du boulot anticipé, nous étions quelques-un à vouloir revenir en adolescence face à la grande scène où Taylor Momsen et ses Pretty Reckless s’apprêtaient à faire péter les guitares. La grande blonde surgit sur scène et on prie tous très fort pour un « Make me wanna die » qui ne vient que trop tardivement. Peu des chansons ayant bercées mon collège, un discret pogo est vite abrégé par la foule de minettes qui étaient visiblement plus venu pour « la meuf de Gossip Girl » que pour le rock’n’roll. Dommage, on va prendre un verre devant Beach Fossil (cool!) avant At The Drive In. 

19h30:

Les amateurs sont au rendez-vous, la bande du groupe mythique enchaîne un show millimétré et sans grande fantaisie mais musicalement parfait sur toute la ligne. Il n’y a pas grand chose à redire sur un groupe qui n’en est pas à son coup d’essai, cependant pas assez prenant pour ignorer son envie de s’asseoir dans l’herbe.

21h:

Là est le moment compliqué d’un festival où son coeur balance entre plusieurs scènes, c’est en courant qu’on passe de The Jesus & The Mary Chain (superbes échos du public) à l’inévitable Franz Ferdinand qui accomplit de faire danser des milliers de personnes, évidemment.

23h:

La fête se poursuit entre la chouette performance de MO et la surprise de Flume. Ne pensant bouger mes fesses que sur les gros titres du jeune DJ, quel ne fut pas mon plaisir quand son set à l’ambiance électrique et aux effets à applaudir m’a tenu en haleine du début à la fin. Commercial, certes, mais surprenant quant à l’avis que je m’en faisais, et je ne devais pas être la seule.

Premier jour de chauffe sans battement de coeur à 3000, mais sympathique.

Samedi, 15h00:

Ayant tanné mes amis toute la matinée pour arriver à l’heure afin de danser et chanter sur mon coup de coeur du moment aka Thérapie Taxi, nous arrivons juste à temps à la scène de l’Industrie pour les voir arriver. Ambiance familiale et dérapages contrôlés, un grand bravo à eux pour cette performance qui, si elle est la première dans un festival de cette envergure, est loin d’être la dernière.

17h00:

Allons gaiement calmer nos cordes vocales en écoutant les indémodables Band of Horses, préparant nos jambes pour danser pendant plus d’une heure sur la superbe prestation de Jain. Là aussi une surprise. Pas seulement sympa et douée la meuf, non non non, elle emmène réellement son public et du coup bah moi avec. Une surdose de bonne humeur qui promet une jolie soirée, on reprend un verre et puis encore un.

20h15:

Alison Mosshart et Jamie Hince font irruption sur la grande scène face à…. Tout le festival ou à peu près. Il ne faisait pas bon se produire au même moment que The Kills qui sont parvenu à rameuter une quantité impressionnante de festivaliers pour un concert qui, comme à leur habitude, ne peut entendre que très peu de reproches.

22h, backstage:

L’espace VIP est bondé, je m’assoie avec un ami quand Raphael, le chanteur de Thérapie Taxi se joint à nous, me permettant de faire cette drunk-interview un peu irréelle mais me laissant le souvenir d’un très bon moment qui ressemblait plus à une discussion nocturne qu’à une table ronde bien cadrée:

E : Comment s’est passée cette ouverture de festival ?

R : Hyper cool, j’ai pris mon pied et on avait très envie depuis longtemps.

E: Quels sont les projets à venir ?

R: Faire un putin d’album et que ça marche un petit peu, au moins pour qu’on en vive.

 E : Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous bouger dans la musique, malgré le foisonnement de la scène parisienne électro et pop ?

R : Oui je vois de quels groupes tu veux parler, il y a peut-être quelque chose de plus accessible.

 E : Par rapport aux textes ?

R : Pas que, aussi par rapport aux mélodies, à l’envie d’être un peu plus mainstream et variet’. Il y a un côté très pop assumé, c’est un challenge un peu plus compliqué de se dire que tu vas aller choper quelqu’un qui n’y connaît rien à la musique et que tu vas l’amener dans un projet vertueux. C’est un peu comme un film de C.Nolan, c’est un mec grand public et qui pourtant va emmener les gens un peu plus loin. On a des mélodies pop, des trucs qui se retiennent comme « Salope », avec cette volonté on veut faire des trucs grands publics mais aussi amener des gens dans une autre réflexion. Plein de groupes n’iront pas chercher les gens hors du microcosme parisien. C’est permettre aux gens de s’identifier.

 E :Il y a souvent un miroir homme/femme, quelque chose d’assez générationel dans vos chansons, un thème voulu ?

R : On construit ça avec Adé, lâcher un point de vue masculin puis un féminin. Sur « salope » c’est montrer que tu es capable de sortir plein d’insultes même en temps que femme, que les filles peuvent aussi être pleine de haine et de colère. C’est un exemple parmi d’autres, même dans Adéna il y a des prises de position qu’on a envie de montrer. On essaie d’être véridique. Tous les deux on a le même processus d’écriture, on écrit sur ce qu’on vit.

E : Dans ce que tu disais, sur la femme, vous vous voulez engagé ?

R : Je me considère comme faisant partie des personnes tellement engagées qu’elles n’ont même plus besoin de le justifier. La cause féminine c’est un truc qui n’est pas aboutit, dans une bonne voie mais il y a encore plein de choses à faire, la parité on n’y est pas encore, c’est un combat naturel et noble, je ne comprends même pas pourquoi on en est encore à là. Tout cet amour là je l’ai en moi et c’est un truc qui n’est pas forcément perceptible dans nos chansons, on est tellement au-dessus de ça qu’on ne l’explicite pas nécessairement. J’ai dealé depuis longtemps avec moi-même, je sais pourquoi je ne suis pas quelqu’un de raciste, d’homophobe, je sais pourquoi j’aime profondément l’être humain tel qu’il est et c’est si naturel que je peux en parler avec second degré car c’est quelque chose d’acquis, je peux me regarder en face. Sur la femme, la position des gays, c’est d’une autre époque d’être homophobe.

 E : Il y a des sujets qui vous tiennent à cœur en projets à venir ?

R :Non pas spécialement, c’est le premier step d’un album qui se construit comme ça, tout ce qu’on a fait comme textes c’était des trucs qu’on a vécu, des trucs d’ados ou de post-adolescence, tu fais la teuf, t’es mal, t’aime quelqu’un, enfin des trucs basiques et je t’avoue que pour l’instant je ne me sens pas la puissance d’écrivain de faire plus. J’espère que ça arrivera car il y a plein de thèmes qui me taraudent comme la peur de la mort ou la philanthropie que pour l’instant je ne parviens pas à mettre en chanson. Ca ne me vient pas pour le moment, Adé non plus je crois, on n’a peut-être pas encore assez vécu, pas assez de recul pour faire ça bien. Mais je suis très content de ce qu’on fait, on bosse comme des malades sur cet album et il aborde quand même des sujets importants. Quand tu parles de ta redescente le lendemain tu abordes l’existentialisme par exemple. Il y a un texte qui sera sur l’album qui s’appelle  « Zarba » et où tout est à l’envers et où cette recherche de toi même interroge la recherche de liberté dans la drogue et dans l’alcool, quelque chose d’assez profond mais avec un œil post-adolescent. On n’est pas assez vieux !

 E : Pour finir, si vous deviez nommer deux grandes inspirations ?

R : Arthur de Feu Chatterton et La Femme, évidemment.

 23h00:

Brève interruption pour aller voir la prêtresse PJ Harvey. Brève car décevante, au-delà de l’imaginable. A savoir que la programmation du festival aurait sans doute gagné à la faire passer plus tôt dans la soirée, l’aspect « clou du spectacle » aurait peut-être permis d’éviter un peu cette désillusion…

Dimanche, 17h00:

 C’est un peu crevés de la veille et les pattes en compote que l’on arrive à la scène de la Cascade pour Ty Segall. Les fans sont bouillants et le rockeur semble satisfaire son public, sympa, pas de coup de foudre.

18h00:

Mac Demarco prend la relève sur la grande scène pour un live tout en chill et en bonne humeur, le soleil, la musique et son humour jettent un vent de Woodstock sur Rock En Seine et il semblerait que personne n’ait à y redire. Mais pas le temps, Denzel Curry s’agite déjà sur la scène de l’Industrie.

Révélation live de ce dimanche, je conseille vivement à tout amateur de rap trash et de hip-hop de saisir ses places pour sa prochaine date parisienne. L’américain est stupéfiant et son public en feu. Tous les auditoires sont séduits, les pogo s’enchainent et la foule est en liesse, standing ovation mentale pour le rappeur.

19h15:

changement d’ambiance radicale en se dirigeant vers la scène île de France où la jolie Clara Luciani a déjà commencé ses vocalises. Belle surprise également, particulièrement sa reprise de The Bay du groupe Metronomy, remaniée et en français s’il-vous-plaît.

20h00:

Nous sommes nombreux à nous asphyxier dans les vapeurs de Cypress Hill, un live où le public saute, chante et prend part à la mise en scène du groupe, amusant et pas décevant une minute, contents de se dire qu’on les aura vu au moins une fois.

22h00:

Un au revoir aux sons de Rone pour l’investissement massif du festival, à savoir le duo de the XX. Planant et poétique, leur concert correspond aux attentes et la (très grande) foule semble conquise. Une clôture sans folie mais jolie.

Une nouvelle édition sans grandes fausses notes et sans vagues mais qui permet de belles découvertes et des confortations musicales.

A l’année prochaine!