Praa, le nom vient de la rue de Prague, à Rennes, où Marion Lagassat a grandi. Elle porte le projet depuis près de deux ans, accompagnée notamment par le label de Timsters, Elephant and Castle. La rennaise a été notamment accompagnée par le dispositif de résidences des Transmusicales, à l’UBU, et a fait les tournées des Trans’. Des titres et clips très séduisants nous ont mis sur la voie que cette voix avait quelque chose en plus. Le concert que Praa a donné le Samedi 8 Décembre à l’Etage, pendant les Transmusicales, dont le report est à retrouver ici, nous a coupé le souffle. Rencontre avec celle qui est déjà une des grandes révélations de cette édition 2018.

On a vu dans une de tes interviews que tu as joué au Pop Up. On organise pas mal de soirées là-bas. Il y avait d’autres artistes le même soir ?

Praa : Oui, c’était une soirée Allo Floride, The Gum Club et Jack, le média. Il y avait Miel de montagne et FORM. C’était chouette, pour une première date parisienne pour moi sous ce nom ! C’est un super lieu.

Peux-tu nous parler de la genèse de ton projet, Praa ?

Praa : J’ai eu un autre projet personnel avant. Beaucoup plus folk, americana. Qui a découlé de mes années d’apprentissage de la musique, depuis très jeune (7 ans). J’ai intégré le conservatoire à 15 ans, en guitare, chant gospel, et chant lyrique, et ai commencé à composer autour de cet âge-là. J’ai fait mes premiers concerts peu après et ai commencé à tourner pas mal, à faire des premières parties vers 20 ans. C’est ce qui m’a appris la scène.

Ça fait à peu près deux ans que je travaille sur le projet Praa. Je ne me reconnaissais plus dans l’esthétique folk, où j’étais toute seule derrière ma guitare. J’avais besoin de pouvoir m’exprimer plus librement sur scène. J’ai grandi devant des clips de Mickael Jackson, devant Dirty dancing, Flashdance… j’avais envie de danser, de bouger. Avec l’esthétique dans laquelle j’étais, ce n’était pas possible. Je viens aussi de la pop, mais je ne savais pas comment y arriver.

Qu’est ce qui a alors fait le déclic, il y a deux ans ?

Praa : La rencontre avec le producteur avec qui je travaille, Timsters, un artiste et producteur rennais. Il montait son label, Elephant and Castle. Il connaissait déjà mon projet folk. Je lui ai fait écouter les nouvelles compositions que j’avais écrites, expliqué mes envies et mes influences. Il a tout de suite vu comment il pourrait m’aider. On a donc commencé le travail ensemble en studio, régulièrement, pour façonner le son que j’allais déployer ensuite. Il a aussi de grosses influences pop, on a façonné ce son ensemble.

Comment l’as-tu rencontré ?

Praa : Je le connaissais déjà via son autre projet, Manceau, dont j’étais très fan. Il a travaillé avec moi sur mon premier EP, sous mon ancien nom. Et puis Rennes, ce qui est super, c’est que c’est à taille humaine, et qu’on rencontre vite tout le monde. On s’est beaucoup croisés ces dernières années. Et puis ça a été une question de timing.

Y a-t-il d’autres personnes de la scène rennaise qui t’ont accompagné ? Quel rôle a eu Jean Louis Brossard ?

Praa : Jean Louis a été très bienveillant auprès de nous. Il suivait déjà mon projet folk avant. J’avais fait une résidence pour lui en filage. Mais c’était moins sa came pour les Transmusicales. (Ca ne groovait pas assez ? Rires) Quand on a commencé à avoir plusieurs chansons cohérentes pour Praa, il a vraiment accroché.

J’ai aussi collaboré avec d’autres artistes du label Elephant and Castle), qui est une petite famille. Notamment l’artiste Maximilien, qui vient de sortir son album, et avec qui j’ai fait un featuring, qui s’appelle Alliance. Les Colorado également, un groupe de synth pop absolument génial. On a d’ailleurs fait un featuring qui va sortir sur leur album (info exclusive !)

Et d’autres artistes comme Her ?

Oui, j’étais très proche de Simon. J’avais fait une session studio avec lui, et il avait une envie de m’amener vers des choses plus modernes. On avait fait un titre en studio ensemble, pour m’amener vers ces sonorités que j’ai développées bien après. J’ai aussi fait les chœurs pour Her sur leur Tape II.

On imagine que tu sais déjà depuis un petit moment que tu jouais aux Transmusicales, que tu l’as beaucoup préparée…

Praa : Je l’ai su hier ! (Rires) On a reçu un coup de fil de Jean Louis cet été, qui nous l’a annoncé comme ça, en direct. Plutôt chouette ! On a beaucoup préparé la date. En résidence à l’Echonova, à Vannes, à La Nouvelle vague à Saint Malo, et à l’Antipode à Rennes, depuis Juin. En complément de l’accompagnement en résidence qu’on a eu avec les Transmusicales, à l’UBU, et des tournées des Trans’.

La configuration du Pop Up VS la configuration actuelle. Qu’est ce qui a changé ?

Praa : Beaucoup de choses ! Les morceaux ont bien évolué, parce que je sais vraiment où je veux aller. Je veux recentrer le projet vers de la pop, et perdre l’étiquette R&B qu’on a pu coller au début. J’ai envie que les gens bougent ! Quand j’ai fait ces premiers concerts, j’ai vu que les gens pouvaient réagir, en chantant, en dansant, c’était tellement cool ! Devant mon projet folk les gens pleuraient !

La formule scénique également. Au départ on était que deux. Aujourd’hui un bassiste et une guitariste nous accompagnent. Hier soir on a ajouté quelques surprises… Des choristes, et puis un saxophoniste, parce que vive l’Amérique ! (Rires) Ce que j’aime en concert, c’est voir des musiciens s’éclater.

Show à l’américaine ou pas ?

Praa : Oui, je m’y retrouve ! Je suis allée voir Paul Mc Cartney il y a une semaine. Show à l’américaine, les flammes, les feux d’artifice, je veux faire ça ! 

Hier on l’a bien senti ! Justement, en ce qui concerne l’esthétique live très scénographiée, et les jeux de lumière assez dingues, quelle part as-tu dans l’élaboration de cet univers scénique?

Praa : J’ai la chance de collaborer avec plein de techniciens supers et d’artistes au top. J’avais cette volonté d’avoir un show lumière. C’était l’étape d’après. Avoir bien bossé le live avec les musiciens. J’ai aussi la chance d’être accompagnée par Allô Floride qui sont aussi producteurs du spectacle. Quand on a su qu’il y avait cette date aux Transmusicales, on s’est dit qu’il fallait faire quelque chose pour marquer le coup. Et la création lumière va nous suivre pour les prochains concerts.

Tu comptes donc continuer avec cette formation ?

Oui, hormis les invités d’hier, puisqu’on ne peut pas encore être tous sur la route. Mais ça ne saurait tarder, qui sait ?

Toujours dans l’aspect esthétique du projet, dans quelle mesure tu as décidé des choses dans tes clips, et tes covers ?

Le clip, c’est quelque chose que j’ai toujours voulu faire. J’ai grandi devant les clips de M6, comme Charlie et Lulu… (rires), de Mickael Jackson et d’autres. J’ai à chaque fois fait appel à des réalisateurs. J’avais néanmoins à chaque fois une couleur de là vers où je voulais aller, des références que je voulais respecter. En sortant les singles, je voulais aussi qu’il y ait une image associée, qui lie le clip à la musique.

Dans les univers que tu développes, dont tu parles dans d’autres interviews, reviennent souvent l’ »Americana », les grands paysages. Est-ce que tu as voyagé pour éprouver ça ?

A fond. Dès que j’ai eu la majorité, je suis partie. D’abord sur la côte Est, ayant de la famille là-bas. Ils ne parlent pas un moment de français, donc j’ai baigné dans la langue. Mais mon grand rêve c’était la côte Ouest. J’y suis allée toute seule une première fois à 21 ans pendant un mois. J’ai écrit mon premier EP à la suite de ce voyage.

Puis il y a 3 ans, j’ai refait un gros roadtrip là-bas, pour prendre les grandes routes qui ont bercé mon enfance. Dans l’Arizona, l’Utah, tous les Grands parcs, c’était un rêve de gosse.

Tu as fait des rencontres là-bas ? Qui ont pu déboucher des collaborations, ou pourraient potentiellement déboucher sur des collaborations à venir ?

Quand j’y étais, j’ai essayé de distinguer le voyage du travail musical. J’ai fait des rencontres incroyables, mais c’était une expérience humaine plus que musicale.

Ceci dit, j’ai retrouvé là-bas un artiste avec qui j’avais collaboré en France. C’est Angus Stone, du duo Angus & Julia Stone. J’avais fait une tournée avec lui quelques mois auparavant. Quand j’ai été à Los Angeles, il était là-bas, et enregistrait leur nouvel album avec sa sœur, et Rick Rubin, qui a notamment réalisé les albums de Her. Ça a été très inspirant de voir comment ils composaient tous les deux. J’étais beaucoup avec eux, dans une petite maison à Los Angeles. Ils m’ont poussé à faire de la musique à fond, et à y aller. Ça a été un push pour commencer à m’y mettre sérieusement.

En parlant de collaboration, quelle serait celle dont tu rêverais ?

Praa : Est-ce que c’est un rêve réalisable ? (rires) Il y a une artiste en ce moment que j’aime énormément, c’est Christine and the Queens. J’ai adoré son deuxième album. C’est quelqu’un avec qui j’aimerais bien produire un son. Sinon j’aurais dit Mickael Jackson, mais c’est un peu plus compliqué. (rires)

Quelles sont les prochaines échéances ?

Praa : On est en train de travailler sur l’EP, à fond. Un EP qui devrait sortir au printemps. Je travaille en parallèle pour du matériel, pour l’album… J’ai pu aller à Londres et à New york récemment pour collaborer avec des artistes et des producteurs là-bas.

L’EP contiendra un des titres déjà sortis ?

Praa : Je vais partir sur du neuf. J’ai envie d’affirmer une étiquette beaucoup plus pop que ce qui est déjà sorti.

Est-ce que l’EP va être infusé de groove, de la patte de Jean Louis Brossard, ou en tous cas par ce que tu as développé pour les Transmusicales ?

Praa : Il aime beaucoup les musiciens avec qui je joue et il sait qu’ils ont déjà un groove, qu’il aime beaucoup. Je sais qu’il adore Do it all again, donc ça donne beaucoup de confiance sur ce morceau par exemple. J’adore Jean Louis, et ses conseils sont toujours formateurs, de la part de quelqu’un qui a vu tellement de groupes dans sa vie. Mais c’est aussi important de s’écouter soi-même, pour être vrai avec ce que l’on veut être et ce que l’on veut faire.