Dans son premier album, Thibaud Vanhooland alias Voyou nous montre l’étendue de sa palette musicale dans une variation de 11 titres.

Sorti sur l’excellent label Entreprise, auquel on doit les dernières sorties de Grand Blanc, Bagarre ou encore Fishbach, pour ne citer qu’eux, cet album nous montre qu’il faudra désormais compter aussi sur Voyou. Dès la première écoute de cet album, les titres défilent et s’enchaînent sans une cohérence particulière si ce n’est ce thème naturaliste qui semble guider « Les Bruits de la Ville ». Néanmoins, lorsqu’on tend l’oreille, cet album est rempli de petits bijoux et Listen Up vous en révèle quelques uns.

Une immense attention portée sur le son

En dépit d’une impression globale Lo-Fi que nous renvoient les mélodies simples et efficaces, Voyou  décime tout au long de son premier album des références qui rendent sa musique bien particulière.

La première est bien évidemment sa trompette que l’on retrouve dans plusieurs morceaux de Les Bruits de la Ville. Sur « À Nos Jeunesses », joyeusement bossa nova et aux faux airs de Henry Salvador, Voyou utilise juste ce qu’il faut de cuivres pour porter la mélodie et sa voix, pour créer de petites ruptures qui embaument le refrain de fraîcheur. « Sur Seul sur ton tandem», « Papillon» ou « La Fille Sans Visage», la trompette arrive en fin de morceau pour une fin en apothéose sonore. On retrouve encore les cuivres dans « Lille», dernier morceaux qui vient boucler la boucle.

La deuxième est une utilisation très subtile d’éléments sonores pour rendre ses morceaux plus cinématographiques. Les plus évidentes sont la voix d’enfants sur « Il Neige», les bruits d’oiseaux sur « On a Marché sur la Lune». Si dans le premier cas, cela nous transporte dans une ville que la neige a rendu silencieuse et nous renvoie à nos batailles de boules de neige de la cour de récréation, la seconde vient accentuer, en miroir, la course à la technologie et la conquête de la lune décrite dans le morceau.

La troisième est l’art de la rupture. Les morceaux de Voyou sont souvent construits avec une rupture qui vient casser le rythme en laissant l’auditeur en suspens, l’un des meilleurs exemples se trouve dans « Les Bruits de la Ville » avec Yelle, qui est entrecoupé d’une boucle qui fait basculer le titre ailleurs.

La dernière, et non des moindres, est une composition électronique qui laisse pleinement sa place aux instruments et/ou à la voix. Sur des productions hyper lo-fi, où l’on retrouve souvent de la batterie électronique, Voyou réussit à créer une électro-pop où la voix (souvent additionnée de choeurs féminins), les mots  – parfois même le sifflement, comme dans « Dehors » –  ont toute leur importance. Ce savant mélange nous donne souvent furieusement envie de danser, comme sur le morceau tout en crescendo «La Fille Sans Visage » ou l’hyper énergique « On a marché sur la lune».

Une poésie du quotidien

Du point de vue lyrique, les chansons de Voyou sont comme des comptines pour les jeunes adultes que nous sommes. Entre prose élégante, rimes croisées, jeux de mots et calembours, les textes de Voyou brillent par leur fausse simplicité. Ses textes ont une place centrale dans sa composition, ce qui explique certainement l’efficacité de chacune de ses phrases. Ces mêmes mots viennent accentuer une note ou casser un rythme avec une non-linéarité savamment orchestrée. Avec simplicité et talent, il nous décrit nos petits tracas (comme dans « Les Trois Loubards»), nos amours et la nature qui disparaît peu à peu de nos villes. La poésie de Voyou est toute là, dans cette faculté à ouvrir les yeux sur un monde complexe et à nous le retranscrire avec simplicité dans ses paroles. La gymnastique verbale de Voyou nous réjouit parce qu’elle est tendrement régressive mais toujours joyeuse, comme dans « La Serre » .


Deux titres à part musicalement

Dans un piano-voix d’un peu plus de 4 minutes, Voyou nous montre l’étendu de son talent dans un ôde à regarder nos villes qu’on auraient tout intérêt à redécouvrir sur « Il Neige » . Enfin le titre qui clotûre cet album, «Lille»  est une lettre d’amour orchestrale adressée à sa ville de cœur et qui vous donnera sans aucun doute l’envie d’aller voir les briques du Nord. Pour ces deux morceaux, Voyou choisit de ne pas utiliser de sonorités électroniques et on en redemande.

 

Si vous ne l’avez pas encore fait, ruez-vous sur le premier album de Voyou, « Les Bruits de la Ville »,  qui rend nos vies citadines plus belles.

Voyou sera en concert à la Cigale le 10 Avril.