Listen Up vous fait revenir cette première journée de la Route du Rock édition 2023. Avec une programmation vraiment très alléchante, cette première journée au Fort-de-Saint-Père a tenu toutes ses promesses.

Avant de vous emmener sur le lieu principal de la Route du Rock, nous avons bien sûr fait un tour sur la désormais traditionnelle scène de la plage de Bon-Secours où se tient chaque jour un concert dans l’après-midi – gratuit – en pleine ville à Saint-Malo. On y croise toujours un mélange de festivalier.es qui ne souhaitent rien rater de la programmation – ou juste se poser devant un concert après un déjeuner en ville – mais aussi de nombreu.ses touristes qui ne comprennent pas toujours bien ce qu’il se passe. Cet après-midi, c’est la dublinoise Aoife Nessa Frances qui joue les compositions de son dernier album très réussi, « Projector ». Avec un groupe en quatuor, elle produit une ambiance vraiment envoutante autour de ces chansons folk magnifiées par l’ambiance de la plage et sa langueur. Un choix à nouveau très judicieux de programmation, puisque ce concert nous transporte vraiment ailleurs et permet d’entrer en douceur dans cette édition de la Route du Rock.

Quelques années heures plus tard, après un passage par les navettes qui nous emmènent sur site, nous assistons au premier concert de la soirée sur la petite scène : Jonathan Personne. Avec son groupe, le québecois a la lourde tâche d’entamer les hostilités et heureusement pour lui le public arrive au fil des minutes en nombre pour assister au concert. Le groupe enchaine les titres très classiquement inscrit dans une tradition rock très pop, avec un soupçon de mélancolie et quelques envolées plus lourdes. Nous n’arrivons cependant pas à rentrer complètement dans le set, les compositions ne se démarquant pas vraiment de ce qu’on a l’habitude d’entendre et manquant peut-être un peu d’intensité émotionnelle pour complètement exploser. Un set tout à fait sympathique cependant pour commencer la soirée.

@Mickael Burlot, 2023.

Le premier vrai choc pour nous viendra cependant juste après avec la performance de Dry Cleaning. Le quatuor du Sud de Londres emmené par Florence Shaw arrive sur scène pour nous emmener dans son post-punk mélancolique marqué du flow de parole désabusé et très expressif de Shaw. Dès les premières chansons, on a aucun mal à rentrer dans ce concert qui se marie très bien avec le coucher de soleil qui commence à tomber sur le Fort. Les chansons du dernier disque « Stumpwork » fonctionne encore mieux dans ce contexte, et on comprend que le groupe à chercher à accentuer les aspects plus subtils de ses compositions mais pour y injecter une force émotionnelle renouvelée. Le guitariste Tom Dowse est à son habitude très expressif, à la fois dans son jeu de guitare mais aussi par ses mimiques et l’intensité qu’il met dans sa performance. Les chansons de « New Long Leg » se marie très bien avec celles du nouvelle album et on se délecte d’entendre à nouveau des titres devenus incontournables comme « Scratchcard Lanyard ». Un premier coup de cœur pour nous.

@Mickael Burlot, 2023.

Nous aurions dû ensuite assister au concert des Viagra Boys dont nous apprenons malheureusement un peu plus tôt que celui-ci est annulé pour cause de maladie de plusieurs membres du groupe. Heureusement, la Route du Rock ne déçoit jamais et est parvenu à trouver le moyen de les remplacer par Squid, le groupe post-punk jazzy de Brighton. En arrivant sur scène, Ollie Judge annonce « We are not Viagra Boys ». Cela n’empêche pas le public de la Route du Rock d’accueillir le groupe de façon très chaleureuse, car ici chacun.e sait que Squid est un remplacement de choix. Le groupe commence doucement avec « Green Light » issu du dernier disque « O Monolith » sorti cette année. Les choses sérieuses commencent avec « Swing (In a Dream) » et son final dantesque. Au milieu du concert, Judge demande à nouveau à la foule si elle était venu voir les Viagra Boys avant de se lancer dans une reprise de leur tube « Sports » qui a ravi tout le monde présent. Plein d’énergie, le groupe reprend parfaitement la chanson et on ne peut que saluer ce geste qui restera l’un des grands moments de cette édition du festival. Squid finit son set par « The Blades », un des meilleurs titres de leur dernier opus, qui sonne encore plus épique en live. Une acclamation géante finit ce concert inattendu et magique.

@Mickael Burlot, 2023.

Pas le temps de se remettre de ses émotions à la Route du Rock : on enchaine avec le concert furieux et intense de Gilla Band. Le groupe irlandais n’est – à son habitude – pas venu faire de la figuration et met l’intensité à 110% dès les premières notes. Le groupe se mute en une machine bien huilée qui propose un mur de son saturé et la voix transperçante de Dara Kiely. On avait peur de la réaction du public devant un groupe si agressif et peu accessible – on se souvient de concerts antérieurs en festival où parfois on voyait les gens un peu perdu – mais ce n’est pas du tout le cas ce soir. L’alchimie prend fort et le groupe est acclamé chaleureusement par le public du festival. Le quatuor présente plusieurs compositions de leur dernier disque « Most Normal » ainsi que certains titres plus anciens. Ils finissent le concert par leur traditionnelle – et énorme – reprise de Blawan « Why They Hide Their Bodies Under My Garage ? » – devenu un incontournable live du groupe. L’un des meilleurs concerts de Gilla Band que nous ayons pu voir.

@Mickael Burlot, 2023.

La soirée est déjà longue de notre côté donc nous ratons malheureusement une bonne partie du set de M83, que nous voyons de loin en attendant un encas bien mérité – merci les écrans géants ! Le groupe semble très carré et les chansons s’enchainent avec aisance et facilité dans une ambiance synth pop qui a fait la renommée du groupe. Dans notre file d’attente, un inconnu qui nous accompagne nous dit qu’il souhaite surtout ne pas rater LE tube « Midnight City »… Et c’est en tout cas ce qui arrive pour nous puisque qu’on a pu se faufiler dans la foule – assez dense tout de même – juste pour ce titre qui fait toujours son petit effet, ainsi que pour la fin du concert. Le groupe est en tout cas visiblement heureux d’être là et on est contents que la Route du Rock offre aussi des moments comme ceux-ci aux festivalier.es.

@Mickael Burlot, 2023.

On se dirige ensuite vers la petite scène des Remparts pour un changement radical d’ambiance : Special Interest, le trio de Nouvelle-Orléans venu défendre leur album « Endure » largement salué par la critique l’année dernière. Avec un mélange de r’n’b/soul et de sonorités plus industrielles/post-punk, le groupe avait su saisir une niche pas très exploitée et marquer les esprits. Pour ce concert en tout cas, le moins qu’on puisse dire, c’est que l’aspect punk prend le dessus et transforme quasi chaque titre en disco très sombre et puissante, avec une guitare qui ajoute beaucoup de distorsions au-dessus des beats. Alli Logout, au chant, est très charismatique et offre une performance plus énergique et intense que ce que l’on entend sur l’album en motivant le public et à grand renfort de paroles criées. Il y avait encore beaucoup de monde pour ce concert, ce qui a visiblement impressionné Logout : « Donc les rumeurs sont vraies : on peut vraiment juste lancer son groupe et faire une tournée partout dans le monde ».

@Mickael Burlot, 2023.

Après cette très belle découverte, on se dirige évidemment vers la grande scène où une grande foule s’est déjà amassée pour la tête d’affiche de la journée (du festival en entier ?), à savoir les incontournables australiens de King Gizzard and the Lizard Wizard. La déception était très forte l’année dernière lorsque le groupe avait dû annuler sa venue quelques jours avant la 30ème édition de la Route du Rock, expliquant en partie une édition 2022 avec un nombre modéré d’entrées. Mais ils sont bien là cette année et ont délivré un set d’1h30 qui a ravi les fans et les nouveau.lles venu.es. Avec une setlist de 10 titres seulement, le groupe a fait la part belle aux compositions longues de leur immense catalogue (24 albums studio en 11 ans !!!). Le set était très bien construit autour d’une véritable montée en puissance, avec des compos plus jazzy au début (« The Dripping Tap », « Iron Lung »), des titres vraiment dansants comme « Ice V », même un morceau rap avec « The Grim Reaper », mais c’est vraiment les derniers titres qui ont fait décoller le concert ainsi que les pogos. En puisant dans les titres les plus thrash metal, King Gizz’ ont fait monter la température d’un cran, littéralement. Avec un enchainement « Mars for the Rich », « Planet B » et les plus récents « Supercell » et « Gilla Monster », le final a été une vrai apothéose d’énergie et de puissance. On se dit que le groupe a bien mérité sa réputation et son statut, et aussi que l’attente d’un an aura bien valu le coup. C’est d’ailleurs après ce moment d’euphorie collective que l’organisation a lancé sa fameuse « chenille » pour faire durer la fête encore loin dans la nuit.

@Mickael Burlot, 2023.

De notre côté, nous sommes allés faire un tour du côté des douves pour (re)découvrir cet espace réouvert cette année qui est destinée aux after-party du festival et où plusieurs DJ sets sont programmés. On profite du set de Marie Davidson qui se prête très bien à l’endroit, au milieu des remparts sur lesquels sont projetés des lumières qui rendent l’expérience immersive. Après un bon moment de danse, on a la chance de rentrer se coucher un peu avant l’orage qui éclate au milieu de la nuit – mais pas assez pour décourager le reste des festivalier.es.

Une première soirée au Fort-de-Saint-Père dont on se souviendra longtemps !