Nous avons piqué une tête en eaux troubles pour la 15e édition du MOFO Festival à Main d’œuvres. Véritable paradis pour mélomanes curieux, la programmation met toujours le paquet pour dégoter des petits joyaux de la scène indé internationale. Cette année encore, nous nous sommes régalés à chacun des concerts, récit de deux soirées de grande qualité.
Dernier soir d’un festival qui nous aura baladé dans tous les sens. La soirée du Samedi 26 Janvier balade tous nos sens, et fait passer nos oreilles par tous les continents auditifs.
KHANA BIERBOOD
Premiers sur le line up (de la soirée du Samedi). Les cinq musiciens originaires de Bangsaen Beach envoient du swell auditif pleins tubes à travers leur surf music made in Thaïlande. Avec leurs dégaines de lycéens américains des 90’s, ils kickent out une bande son de feelgood movie, du type surftrip psychédélique.
Leur live est ponctué de plusieurs déferlantes garage relevées à la musique de western. Un son coloré à la Kikagaku Moyo, et surtout BJM. Anton Newcombe aurait-il enfanté des héritiers à la cool en Asie du Sud Est ?
LAURENCE WASSER
Moment attendu de ce MOFO#15, la restitution de la résidence de Laurence Wasser fait beaucoup de bien à la musique. Dans tout ce que les voyages peuvent apporter en influences et en rencontres de styles, il en tire quelque chose de pur et d’unique.
Il nous emmène sur les chemins entre des paysages à la Zabriskie Point et Hiroshige. Du chant de cowboy, des vocalises de moine bouddhiste et des musiques traditionnelles japonaises. Les instruments se succèdent, des claquettes à l’accordéon, en passant par la flûte nippone. Mais c’est surtout de son organe vocal, et particulièrement de son extrémité labiale, dont Laurence Wasser se sert, sublimant l’innocence de gestes de gosse. On en sourit, vaguement moqueurs, mais putain, c’est beau.
Il réussit à accrocher le public à un moment chamanique des temps modernes pendant une bonne heure. Les perplexes et les conformistes se laissent prendre au jeu, et à onduler sous la transe séduisante du drôle de bonhomme sur scène.
Il n’y a pour l’instant pas de son enregistré permettant de se rendre compte à l’écoute de ce que pouvait donner ce moment bien barré. En attendant, la vidéo Gelly Mummy permet de se faire une idée de la plasticité de l’univers de cet artiste multiformes.
DELACAVE
Les remplaçants au pied levé de Strasbourg ont fait plus qu’assurer le show. Leur mélange entre rock et électro bien énergique a transformé la salle de concert en étuve. On pourrait les situer entre les Black Angels et Oktober Lieber, mais les deux parisiens et leurs musiciens ont leur style propre, jamais déjà entendu.
Delacave, un vrai groupe de live. Aux accents traînants et rugueux, qui remuent quelque chose de très profond dans le corps. Sur scène, ils développent leur univers avec des horizons plus joyeux que ce que l’écoute studio pourrait amener à penser. Du bon gros rock, un orgue parfaitement maîtrisée, des voix ensorceleuses, le tout dans une salle plus noire qu’une nuit sans lune, ça claque.
CHOCOLAT BILLY
Autre curiosité du festival, les bordelais de Chocolat Billy ont la particularité de ne jamais faire deux fois le même concert. Ils affectionnent particulièrement les longues phases d’improvisation et les cris impulsifs, venant du plus profond du thorax, que leur fait pousser le moment présent. La date au MOFO n’a pas dérogé à l’absence de règles. Les problèmes d’ingénierie sonore et les micros se cassant la figure ajoutant au joyeux chaos de l’ensemble, ont transformé leur passage en performance déjantée.
Apparentés krautrock, ils échappent à la répétitivité potentielle du style et lui donnent ses lettres de noblesse avec l’ajout d’une basse bien groovy et un rythme à quatre temps à faire croiser les genoux comme des vrais rockers. Le groupe possède un BAC + 15 en faire danser toi, et toi complètement débrancher tête quand eux jouer musique.
En bref, joie, cris, la jungle, un concert, un vrai.
DOPPLEREFFEKT
Aparté cours d’histoire: Dopplereffekt est un duo formé en 1995, notamment constitué de Gerald Donald. Les innombrables projets de ce dernier, Drexciya plus que tous, ont contribué à faire évoluer la techno dans son ensemble, et particulièrement celle de Détroit. On retrouve des samples sortis de la tête du personnage partout dans la musique électronique aujourd’hui.
On est donc très contents de les voir sur la scène du MOFO , accompagnés de leurs visuels scientistes impressionnants. Être devant Dopplereffekt, c’est faire face à une douce rafale cosmique, mi radio-active mi radio-phonique. Une tranquille mais inéluctable avalanche de bips.
Les stars de la soirée ne sont pas ceux qui y mettent le plus le feu, mais ils resynchronisent intelligemment les cerveaux sur un fonctionnement binaire simple. Pour leur permettre de bien finir le festival, ou d’entamer l’after, c’est selon…
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