Les oreilles n’ont pas de paupières, ne cligne pas des yeux ! Deux minutes contemplatives et l’esprit est ouvert.
Clique et lis, prends goût et reviens-y.
Tranquillement, il traverse le bras de rivière à la nage, parfaitement déterminé à monter au sommet du rocher. Il atteint l’autre rive et ses pieds glissent dans la vase, alors qu’il cherche une branche ou un appui pour se dresser sur la terre ferme.
Rester concentré.
Il écarte les branches, enjambe les ronces et entreprend l’escalade. Ce n’est pas parce qu’il est le « petit » de la bande qu’il ne peut pas sauter du haut caillou. Ce n’est pas parce qu’il a eu besoin de s’accrocher au cou des grands pour résister au courant du fleuve plus tôt, qu’il ne peut pas faire ça. Il tente une première avancée de roche. Le public, en bas, lui indique d’une moue bienveillante que ce n’est pas celle-ci. Volte-face, autres enjambées, nouvelles ronces. La seconde excroissance rocheuse est la bonne et il se félicite d’être arrivé jusqu’ici.
Un pas.
Il regarde ses pieds et aperçoit la chute qui l’attend. Il frissonne malgré les 35°C qui lui chauffent la peau. Les spectateurs le fixent dans l’attente d’un autre pas, décisif, appareil photo paré. Son cœur bat la chamade mais la marche arrière n’est plus possible. L’écharde plantée dans son pied le martyrise et le chemin le plus court pour mettre fin à la tension générale qui s’est installée dans l’air est encore la dizaine de mètres qui le sépare de la surface de l’eau. Son public s’impatiente à présent, après l’avoir encouragé. Il se demande depuis combien de temps il est là, les minutes lui semblent des heures.
Ne pas réfléchir. Ne plus penser. Voilà les conseils que lui argue un canoë qui continue sa route.
Des copains de copains l’ont fait et ils n’en sont pas morts, après tout, que peut-il lui arriver ?
Il inspire une bouffée chaude et s’élance, droit comme un piquet. L’air n’a pas le temps de quitter ses poumons que le choc de son corps pénétrant l’eau lui coupe le souffle. Une seconde plus tard, il sort la tête de la rivière. Sous le regard des présents, il est fier.
Tout est fini.
Tout commence.
Dordogne, été 2015
Ecrire un commentaire