« Un silence vaste, profond qui laisse entendre les battements de son âme ». C’est par ces mots que Romain Delahaye, le nom qui se cache derrière Molécule a voulu introduire sa performance live le 8 mars dernier à l’Elysée-Montmartre.

Loin des bruits assourdissants et de métal bringuebalant issus de son immersion sur un chalutier en pleine mer du Nord pour son premier album 60°43’Nord, il produit ici une éloge du silence.

Le silence certes, mais tour à tour déchiré par des beats techno ne pouvant que nous faire ressentir le froid glacial qui a inspiré -22,7°C, le titre de ce second album signé chez BECAUSE MUSIC. Tous dans les textures et les sons utilisés montre que le producteur parisien s’est fondu dans son environnement lors de ses 5 semaines en plein Groenland avec 140 kilos de matériel sur son traîneau, 50 Eskimo et 300 chiens de traineau.

Dj lassé de la scène parisienne reconverti en aventurier mélomane : il développe un goût pour l’anthropologie musicale qui vient rafraîchir la scène techno. fondateur de son label Mille Feuilles, il promeut certains futurs noms de la techno comme Andrew Claristidge, Baroque ou Automat. La salle mythique de l’Elysée Montmartre qui l’accueille est bondée, cela lui donne une crédibilité supplémentaire en temps qu’explorateur musical endurci.

Entrée en matière avec Violence comme deuxième titre qui résonne dans toute la salle, track inquiétante où l’on vous laisse regarder le clip pour découvrir ce qui vient troubler cette ode au silence et à la paix. On est loin du dub que le producteur parisien affectionnait dans les années 2000. L’accroche est énergique, le public se compacte et se rapproche de Molécule, il a  définitivement capté notre attention.

Après avoir brisé la glace avec le public, Molécule déroule sobrement son second album dans une performance live impeccable. Ses machines, disposées autour de lui, attestent de l’image d’un homme seul avec ses machines. Autre nouveauté pour ce live, c’est la l’igloo disposé derrière lui permettant de projeter des images captées pendant son trip, de paysages naturels tour à tour rassurants comme des grandes étendues de forêt et décharnés comme des steppes inhospitalières.

Molécule forme une alliance intéressante entre l’homme, son milieu et ses instruments. Au contrôle de ses machine infernales, il va nous tranrporter pendant un live de 1h20 intense, où les morceaux s’enchaîneront en cohérence avec les variations de rythmes. On trouve dans son nouvel album un rapport à la taille de l’Homme dans ce monde, les visuels viennent rappeler la force écrasante de la nature, enrichissant l’expérience musicale. Il explique sa démarche lors d’une interview pour PWFM « Dans mes projets artistiques, je milite pour une écoute de la nature, pour s’en approcher et pour la respecter plus dans nos sociétés modernes. »

Le live avançant, l’aspect industriel de sa techno est fondu dans un ensemble organique. Molécule se démarque des sources d’inspirations qu’il intègre à sa musique par son habilité à varier les styles et les rythmes.  En exemple, Sila a été fait à partir de sons de banquise et d’icebergs qui se craquent. Ce titre est l’expression d’un voyage technoïde et d’un rêve ambiant halluciné habillé des samples pris directement à la source.

Une source, autant d’inspiration que de revendication, certains y verront une expérience personnelle, d’autres le rappel d’une nécessaire prise de conscience environnementale dans ces lieux reculés. Que ce soit entre les bruits sourds des mouvements du chalutier ou les cris des pêcheurs accompagnés de beats, le message de Molécule est passé à l’Élysée Montmartre.

Vous pouvez trouver le rendu live de sa performance, filmé par Arte concert et Sourdoreille:

Si vous voulez plus de détails, un article a été écrit écrit précédemment sur 22,7°C:
http://listnup.fr/2018/02/16/steppes-musicales-de-molecule/