Dans le sillage de leur album Many nights (Talitres), Motorama, originaire de Rostov sur-le-Don, et évoluant désormais en trio, parcourt l’Europe pour répandre la bonne parole cold wavienne.
On a pris le bateau en marche au Petit Bain, où les russes ont déroulé sans trembler leur pop rock atmosphérique et mélancolique pendant près de deux heures. Un concert soufflant un froid vivifiant qui nous a laissé tout sauf de glace.
Fin Octobre, un vent d’Est remonte la Seine pour souffler sur le Petit Bain, contribuant à l’installation de l’atmosphère si particulière qui accompagne les concerts de Motorama, à la fois froide, sérieuse, et joyeusement dansante.
La soirée est ouverte par R. Missing, duo New Yorkais dont l’EP Unsummering (Talitres), sorti en 2017, laisse augurer une belle performance. Sur un fond de nappes électroniques tirant vers l’éthéré, alternant entre dark wave et dream pop, la chanteuse Sharon Shy, tient la salle sous tension avec une voix ténébreusement douce, mais ferme.
La frappe machinique des boîtes à rythme double l’incisivité des paroles et l’alchimie prend d’emblée, mais retombe aussi brusquement que la musique à chaque fin de morceau. Une légère déception commence à poindre son nez quand commencent les premières notes de synthétiseur de « Kelly was a Philistine ». La chanteuse, effacée au fur et mesure du concert, se transcende totalement et emporte le public dans le déploiement de sa puissance scénique. Subjugués, nous aurions voulu voir d’autres morceaux où le groupe est à ce point à son meilleur, mais le tandem doit laisser le plateau être changé.
Motorama nous gratifie d’une arrivée sur scène sous un joyeux morceau de piano, qui se mue rapidement en une sorte de remake de générique d’Eurovision des années 80. Une entrée en matière qui détonne avec la musique du groupe précédent autant qu’avec les images en noir et blanc projetées en fond de ce qui apparaît comme des scènes mélancoliques de la Russie soviétique.
Le sérieux reprend vite le dessus et Vladislav Parshin, le chanteur, tire de sa guitare des accords de façon beaucoup plus hachées que dans les albums, ce qui lui permet de scander les paroles de manière d’autant plus percutante. La pop hypnotisante de « Wind in her hair » et de « Ghost », joués d’emblée, nous emmène dans des paysages mélancoliques dont les mélodies de guitare qui font la signature du groupe révèlent toute la beauté simple, nue.
Dans l’ensemble, le groupe donne un live à l’image des morceaux du nouvel album, joués en alternance avec d’autres plus anciens : sobre, dépourvu de tout superflu, et à la linéarité efficace. Cette dernière fait néanmoins perdre peu à peu le concert en intensité, mais la version grandiose de « Alps », soutenue par d’impressionnants visuels du massif montagneux en fond de scène, prend tout le monde aux tripes.
Motorama touche au plus profond de nos émotions pendant encore quelques morceaux, les colorant autant de post punk que de surf pop, avant de tirer leur révérence devant un public conquis, qui demande immédiatement au groupe de continuer à jouer, encore et encore. Les artistes nous gratifient d’un timide rappel avec une belle
exécution de « Hard Times », dont les sons d’orgue font résonner une dernière fois le Petit Bain avant de se perdre dans les applaudissements.
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