Pour les 10 ans du MaMA, du 16 au 18 Octobre, le cru des découvertes artistiques à se mettre sous la dent est exceptionnel. Listen Up vous a présenté 12 immanquables ici. De nombreux autres y auraient leur place, y compris de bonnes surprises rencontrées en cours de festival.

On retrouve les passages sur scène, en sons et en images, de tout ce beau monde dans le récit des 3 jours de festival. Ici le jour 23, Vendredi 18 Octobre.

Pour retrouver le récit du Jour 1, c’est ici.

Pour celui du Jour 2, c’est ici.

BANDIT BANDIT

© Listen Up – Mickaël burlot

Pour ouvrir ce troisième soir du MaMA 2019, dans les tréfonds de La Boule (très) Noire, Bandit Bandit fait chauffer ses amplis, prêts à cracher du bon gros stoner sombre et sauvage. Guitare-Basse-Batterie, chanteuse punchy, vestes en cuir noir, cheveux longs et frange; le groupe ne réinvente pas la manière de faire du Rock en 2019. Tant mieux, c’est efficace, ça graisse bien les rouages. Classique, oui, et c’est exactement ce dont nos cerveaux un peu ralentis par trois jours de festival ont besoin.

La recette marche, à en réveiller les morts. Sur scène et dans leurs morceaux, ils se la jouent rencontre entre Black Rebel Motorcycle Club et The Kills, à la française. Jouant de leur amour à mort, initiales B&B en bandoulière, virevoltant dans un rodéo infernal qui nous emmène sur la route des Enfers à dos de motos noires sur un lit de flammes.

Ils mettent définitivement la ‘Fever’ à l’audience avec un morceau du même nom, qui n’est pas sans rappeler ‘Entrance Song’, des Black Angels, leurs anges noirs frères de sang. En commun, la rage psychédélique et la fougue pour soulever le sable du Far West avec leurs kicks.

DNGLS – 360° Live

© Listen Up – Mickaël burlot

La Cigale s’est transformée pour ce troisième soir en temple des expériences sonores immersives. C’est DNGLS (prononcer Dangles) qui se charge d’ouvrir le bal avec une maîtrise impeccable du dispositif de projection du son à 360° mis à sa disposition. Le son tourne dans tout l’espace, se rapproche de nous, s’éloigne, vient de partout puis d’un point de la salle. C’est un live, mais on est déjà bien au delà de ça.

Le Breton Maxime Dangles nous emporte vers d’évastés paysages sonores mouvants. Calmes, plats, puis tempêtant et dévastés au fur et à mesure. Une plongée dans les chaos rocheux de la Côte des Légendes, une de ses sources d’inspiration (son très beau live filmé à la Cercle dans le lieu est à voir absolument). Un voyage à travers un ouragan déchaîné et déchaînant. Un maelstrom techno de langages morses qui se répercutent dans tous les sens. Une invitation à rester non statique – Tourner, tourner, tourner encore comme les avalanches sonores.

MAUD GEFFRAY & LAVINIA MEIJER – « STILL LIFE »

© Listen Up – Mickaël burlot

Toujours dans La Cigale, toujours au centre du parterre et du public. Cette fois c’est Maud Geffray, accompagnée de la harpiste hollandaise Lavinia Meijer, qui entrent en scène. Dire que ‘Still Life’, leur hommage à Philipp Glass, nous a bouleversés serait encore loin de la réalité.

Leur duo commence à jouer très paisiblement, comme un vaisseau tranquille sur un océan de sérénité. Guidé par l’ondine à la harpe, qui de ses scintillements montre la voie sonore à suivre. Chaque note aiguë portée par la harpe perce au plus profond de l’inconscient pour y remuer des composantes mélancoliques, qui finissent inévitablement par perler sous forme de larmes au coin des yeux. De ses cordes, elle trace les caps dans la brume de La Cigale, ses doigts fourmillant le long des longs fils blancs comme Maud le long des câbles reliant ses instruments. Un long continuum de fils qui relie les deux musiciennes, traçant un cocon pour de leur musique ne faire qu’un.

Un cocon rond sous la lune qui au fur à mesure de leur concert soulève la houle sonore, s’en mêle de passages quasi Gabberz. La lumière de la salle rougit au fur et à mesure, et dans l’image mentale d’un calme océan apparaissent remous et tourbillons qui achèvent de nous retourner, de nous lessiver. Le concert s’achève, et nous restons. Cœurs et yeux vidés, mais encore remplis de beauté.

MOLECULE – ACOUSMATIC 360

© Listen Up – Mickaël burlot

Pas encore tout à fait remis du précédent live, on retourne dans une Cigale pleine à craquer pour le live de Molecule. Spécialiste des créations audio et visuelles immersives et diffusées à 360 degrés, il s’adjoint ici un partner in crime spécialiste de la diffusion du son dans l’espace, avec qui ils vont proposer quelque chose d’encore jamais entendu, bien au delà d’un concert ou d’une performance, plus proche d’une symphonie de sons rendus libres dans l’espace. Une liberté sonore basée  sur des algorithmes aléatoires et envoyée via des enceintes installées partout dans la Cigale, tout autour de la fosse au centre de laquelle jouent les artistes.

Spécialiste de la capture de sons pendant des tempêtes, Molecule ouvre ici leur cage pour qu’ils recréent l’environnement dans lequel ils ont été pris. Tempête partout, tourbillons tout autour de nous, humains, pris dans quelque chose qui devient bien plus grand que la salle de concert. De concert, les sonars sonores sonnent des signaux dans tous sens, à en donner le tournis! Nous spectateurs, collés sans espace au mètre carré, captons ces sons qui passent au gré de leur envies parfois près de nous, bols d’air a travers lesquels on respire avant de replonger dans la masse compacte du public subjugué.

Captant par vagues ces sons furtifs, Molecule leur intime d’accélérer leur rythme au fur et à mesure du concert. Il attrape kicks et snares pour les envoyer animer les jambes dans le public, rendu aussi libre que les sons, dansant sans contraintes à en faire trembler la salle. Avant que les sons s’envolent d’eux mêmes, hors de La Cigale, suivie par la horde en liesse qui s’en va répandre cette folie vers d’autres lieux de Pigalle.

ATOEM

© Listen Up – Mickaël burlot

De la Cigale à la Boule Noire il n’y a qu’un pas, à faire pour aller voir ce qui restera le plus grand live de ce MaMA, celui d’Atoem (ex-aequo avec celui des Supermen Lovers le soir précédent).

Eux n’ont pas de dispositif de spatialisation sonore à disposition, mais ont autant de maîtrise que les trois groupes précédents quand il s’agit de faire tonner une salle de concert. Les maîtres des machines et chamanes des connexions câblées de leurs synthés et de l’univers font virevolter les volts dans La Boule Noire.

Tripotant les câbles et les recoins de l’esprit, ils créent une atmosphère à l’aura hystérique, jouant avec leur musique des particules du temps pour renverser toute symétrie de l’espace. Plus rien n’a de sens dans le concert d’Atoem, sauf la danse de l’audience électrisée, parcourue des courants que les deux Rennais envoient par leurs machines de scientifiques fous du son.

On était à genoux devant leur live de clôture des dernières Transmusicales, là on s’aplatit carrément devant leur talent. Ils envoient surtout des morceaux de leur nouvel EP « Enter the world’s symmetry » (sorti le 25 Octobre), qui tabassent toujours autant, avec une coloration retro synth 80’s à la Kung Fury survoltante.

Faire le MaMA, voir Atoem, puis mourir.