Le groupe anglais le plus passionnant du moment était de passage à Paris vendredi 5 avril, pour défendre son premier album, l’inclassable « Where’s my utopia ? ». Choristes, roue de la fortune, et pas de danse… Yard Act a retourné le Cabaret Sauvage avec une formule ambitieuse mais le public n’avait d’yeux que pour James Smith, le chanteur, à l’énergie contagieuse.
Les conditions étaient réunies pour un concert mémorable, et ça n’a pas manqué. Le groupe, revenait d’une tournée triomphale à domicile, avec jusqu’à plus de 3 500 spectateurs sur certaines dates. Originaires de Leeds, ils avaient commandé pour l’occasion une météo bien de chez eux, typique du nord de l’Angleterre, un ciel gris et bas, accompagné d’un crachin. Le Cabaret Sauvage, refuge idéal au milieu du parc de la Villette, et la première partie, Murkage Dave, arrive, ghetto-blaster, à la main. Le Londonien est connu pour avoir accompagné The Streets ou encore Tricky (fun fact, on retrouve le français Nekfeu sur la longue liste de collaborations). Ce soir, il enveloppe la salle de sa voix soul, mimant ses textes comme pour mieux inclure le public français.
Damon Albarn, sors de ce corps… !
Une entrée en matière tout en douceur… avant la tempête Yard Act. Le plateau est plus petit que sur la tournée anglaise, mais les quatre membres – sept sur scène, avec un renfort au clavier/saxophone, et deux choristes-danseuses – vont déployer la même énergie. A peine arrivé, le leader, James Smith fait plusieurs fois le tour du plateau, et monte sur les retours comme pour réveiller un public timide. Le set s’ouvre comme l’album, avec le titre « An illusion ». Le groupe le sait, l’album divise, tant il prend des chemins différents, un pied chez les Beastie Boys, un autre chez Beck, et un troisième (soyons fous) chez Blur, la sainte trinité des B.
Est-ce un hasard si James Smith nous fait penser de plus en plus à Damon Albarn ? Le visage parfois angélique, parfois démoniaque, les petits sourires un peu idiot en direction du public, et une manière de chanter comme si sa vie en dépendait. Pas vraiment un hasard, puisque l’album est produit par Remi Kabaka Jr, le batteur de Gorillaz et ami de Damon Albarn.
Avec la fièvre qui caractérisait Blur à ses débuts, Yard Act enchaine les trois premiers titres sans temps morts, aidé par un jeu de lumière impressionnant et se paye le luxe de jouer les trois singles de l’album en première partie du set, « We Make Hits » faisant l’effet d’une décharge.
Fiévreux, mais un peu fébrile. La tournée française a commencé tout en douceur la veille à Nantes, « a smooth start » avant la « wild night » parisienne, écrira ensuite le groupe sur compte Instagram. Au milieu du concert, le groupe expédie la séquence de la roue de la fortune, roue tournée par un spectateur pour décider du titre joué. Puis vient l’enchainement de plusieurs titres de l’EP (le titre éponyme « The Overload » et son chanté-parlé maîtrisé à la perfection, le plus punk « Witness » et l’entêtant « Pay Day »), et alors les premiers rangs exultent, et James Smith affiche un large sourire, comme rassuré.
Car, à l’image de Murkage Dave, les textes sont essentiels chez Yard Act, jouant avec les mots pour mieux ironiser sur un pays en convalescence post-Brexit. Qu’il speak english ou non, peu importe, le public parisien est au rendez-vous, conscient d’assister à l’éclosion d’une future tête d’affiche du rock britannique. Le groupe lève les derniers doutes quand vient l’heure du rappel avec « The Trench Coat Museum ». James Smith hurle au refrain dans un deuxième micro. Le groupe est rejoint par Murkage Dave, pour un final dantesque. See you very soon, guys, qui sait sur la route des festivals cet été ?
Yard Act, le 28 avril aux Nuits Botanique (Bruxelles)
Album disponible Where’s My Utopia ? (Island Records)
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