Les Éveillés, For Beirut, United w/Techo ou encore For Belarus, des compilations solidaires fleurissent depuis quelques temps sur Bandcamp. Soutien aux exilés, à une ville meurtrie, à des quartiers ruinés par le passage du Covid ou encore à un peuple qui lutte pour sa liberté, leurs terrains où ils apportent de l’aide sont nombreux.

Tour d’horizon de ces initiatives qui placent la musique comme canal d’engagements. Et qui présentent des morceaux inédits, quasiment introuvables sur d’autres plateformes. Leur but est de lever des fonds pour des associations autant que de maintenir éveillés les regards qui se portent sur leurs combats. 

Non contentes de constituer des soutiens importants à des personnes pour qui ceux-ci sont vitaux, elles sont des regroupements de perles musicales. On se prend une claque à chaque track ! Un coup de boost qui va toucher profondément le coeur, et transmet l’énergie de s’y mettre. Et comme le formule si bien Yuksek, lorsqu’il parle de l’action commune menée au travers de « For Beirut » : « La musique ne guérit pas, ne reconstruira pas les murs tombés mais elle concentre l’emotion et repousse un peu plus loin les larmes. »

Les compilations musicales caritatives ne sont pas nouvelles en soi, mais leur multiplication et une forme de renouvellement ouvre d’importantes possibilités à l’heure d’éveils militants et solidaires dans les milieux de la musique. Des initiatives pour lesquelles Bandcamp se révèle un support idéal, en prolongement du soutien des artistes activement porté par la plateforme depuis Mars 2020, notamment via ses « Bandcamp Fridays ».

Les quatre compilations solidaires qui suivent sont à compléter par les nombreuses autres qui continuent d’être mises en place. En attendant, bonne découverte !

 

FOR BEIRUT

Place forte cosmopolite de la musique électronique, Beyrouth et sa bouillonnante vie nocturne ont été soufflées le 4 Août 2020. Olivier, co-fondateur du festival Decks on the Beach, qui anime la ville tout au long des étés, frôle la mort et perd subitement son logement, comme des milliers d’autres Libanais.

Quatre de ses amis, habitués du festival et attachés à Beyrouth, lui proposent immédiatement leur aide. Il s’agit d’ATTARI, du duo CLAAP!, et de YUKSEK. De ce qui devait d’abord être un track collaboratif surgit une déclaration d’amour au peuple Libanais. Portée par 18 artistes électro au total, qui créent chacun un morceau inédit. Parlant via leurs sons de ce que Beyrouth est pour eux, et en ouvrant parfois des collaborations incroyables.

Un appel du coeur à faire corps que le visuel créé par Raphaelle Macaron illustre à merveille.

D’un certaine manière, la compilation constitue le prolongement numérique du concert de soutien intitulé « ¡Liban Mön Amöur? », qui a eu lieu au Cabaret Sauvage le 29 Août dernier.

L’intégralité des bénéfices de cette compilation sera reversée à l’ONG Baytna Baytak, chargée de reconstruire des logements à Beyrouth, ce qui devient urgent à l’approche de l’hiver.

 

LES EVEILLES / FLOWING LIGHT

Soutien aux exilés !

La répression qui s’est abattue ces derniers temps sur les exilés en France, comme ailleurs, vient rappeler le besoin vital de soutien et de protection à apporter à celleux qui ont souvent tout quitté. Particulièrement pendant la période hivernale et les moments de confinements et de couvre-feux.

Pour ce faire, les Éveillés vont puiser « dans l’inépuisable potentiel énergétique de la fête », en le redirigeant vers de nouveaux modes d’action. Collectif d’organisateurs et d’artistes engagés, conscients, bénévoles, de lieux qui offrent leurs clefs et donnent carte blanche à la création, ils utilisent les temps d’arrêts de la Nuit pour rester en mouvement et faire briller des lumières de solidarité. Flowing Light !

Musicalement à tomber par terre, la compilation déploie les sons notamment d’Antigone, Epsilove, Myako ou encore de Simo Cell. Elle marque aussi une nouveauté pour l’association après 4 ans d’existence : le lancement du label Les Éveillés Records. Après une trentaine de soirées organisées, au Petit Bain, à la Gaîté Lyrique, dans des espaces publics, ou encore via des passages dans des festivals, ils ont récolté 90 000€.

Une somme qui leur permet d’apporter des soutiens alimentaires, juridiques, logistiques ou encore psychologique aux personnes en situation d’exil. Un militantisme pour que la culture et la fête soient des vecteurs de soutien à celleux qui fuient les dangers de leurs pays qu’ils font vivre avec d’autres organisations : Paris d’ExilThot ou encore La Chapelle Debout. C’est à ces associations qu’iront vos dons.

La magnifique illustration est l’oeuvre d’Antonin Lefevre pour Odd Forms Studio.

 

UNITED W/ TECHO

L’association entre la webradio rennaise Radio Chiguiro et l’ONG Techo a enfanté d’UNITED w/ TECHO. 33 artistes de 14 pays se sont mobilisés dans le but d’aider Techo dans son action. L’ONG  apporte de l’aide aux bidonvilles d’Amérique Latine et des Caraïbes, durement touchés par la crise liée au Covid.

Parmi ceux que l’on a l’habitude de croiser dans des coins francophones, on retrouve KasbaH, Brodinski ou encore Paul Seul. La pochette est signée Philippe Maître, également DJ au sein de Disco Bagarre, et la photo qui y apparaît a elle été gracieusement fournie par le photographe documentaire Pablo E. Piovano.

Les fonds récoltés permettent de financer la construction de logements, de projets d’alimentation en eau potable et d’assainissement de l’eau, de fourniture de nourriture et de kits d’hygiène.

 

FOR BELARUS

Un autre feu de liberté qui se fait étouffer peu à peu est celui qui brûle en Biélorussie (Belarus). Les combats pour faire advenir une démocratie réelle et décente dans le pays du « dernier dictateur d’Europe »crépitent encore pourtant. Et si les braises qui les alimentent ont pour partie disparu, voire été tuées, il en reste encore beaucoup qui choisissent de rougeoyer ardemment, sur place ou depuis d’autres pays, grâce à la musique.

C’est le cas de Galina Ozeran, aka Galya Chikiss, qui vit à Berlin, où s’est exilée une partie de la diaspora artistique Biélorusse. Elle a réuni des musiciens biélorusses qui s’y trouvent et d’autres qui sont encore à Minsk. D’autres sont venus s’y agréger, depuis Berlin ou de zones de friction artistique comme l’Ukraine ou la Russie.

On sort pour pas mal de morceaux du champ de l’électro, mais la puissance du post punk de Super Besse ou Molchat Doma, le rap qui sort des tripes d’Alyona Alyona, et la percutance froid de Chikiss ou encore celle moqueuse de Molly Nilsson sont autant de mèches sonores qui enflamment le coeur de qui écoute leur sifflement allumé.

Les fonds iront à la Belarus Solidarity Foundation, une des nombreuses organisations qui aident les vents de liberté à traverser le pays.

C’est l’artiste Karolis Strautniekas qui a dessiné le ruban de liberté illustrant la compilation. Une image aux couleurs du nouveau drapeau national porté par un peuple en lutte.