On ne va pas tergiverser, cette année la programmation du festival malouin lui assurait d’avoir rarement aussi bien porté son nom. Le Rock, « Une espèce d’énergie brute, spontanée, sans calcul », pour reprendre la définition qu’en donnent le directeur et le programmateur (Cf notre interview d’eux ici), était partout dans cette édition 2019.

Une énergie sauvage même, pouvait-on dire ce Jeudi soir, devant Fontaines D.C, Idles ou encore Black Midi. Une énergie subtile, brute mais sublimée, devant Tame Impala, Pond et Jon Hopkins. Retour sur une soirée ROCK.

 

POND

Alors que la tête d’affiche du festival, Tame Impala, se la chauffait gentiment en loges, c’est un autre groupe australien, ramené dans leurs valises, qui se chargeait d’ouvrir la soirée. Pond. Le « leader » bien deglingos du groupe, Nick Allbrook, n’étant autre que l’ex bassiste de Tame Impala, à l’époque où leurs membres étaient interchangeables. Les chorégraphies de ce chanteur déluré réveillent les pierres du vieux Fort Saint Père tout autant que les festivaliers pour ce premier soir de festival, les apprêtant à trembler pendant trois jours ininterrompus.

La marée humaine qui se masse peu à peu devant eux s’imprègne tranquillement de la douceur colorée de leurs morceaux. Pond prend tout le monde dans leur univers, sous un soleil qui s’abaisse, donnant une lumière qui magnifie chaque pirouette incontrôlée des musiciens.

 

FONTAINES D.C.

Un soleil qui doit changer les Irlandais de Fontaines D.C. de leur ‘Dublin City sky’. Mais qui n’en chauffe que plus à blanc la rage froide du groupe. Maniant le post punk et la poésie Joyco-Poguesienne comme personne, ils décochent méthodiquement leurs flèches lyriques dans les oreilles de chaque route du Rockien, faisant monter leur taux d’adrénaline à des niveaux que la science peinerait à mesurer.

Grian Chatten, le chanteur, tourne comme un fauve en cage, à la recherche d’on ne sait quel morceau de barbaque à se mettre sous la dent. A force de ne plus savoir dans quel coin de la scène donner de la tête, il finit par se donner des claques, comme pour se réveiller, d’une réalité qu’il ne fait qu’effleurer.

Les spectateurs, pas encore totalement dedans au début du concert vu l’heure, vont s’en prendre une bonne aussi. Grian les secoue dans leur état semi-léthargique en leur assénant des « IS IT TOO REAL FOR YA!?? » qui va leur remuer l’arrière train version pogo. Désormais, les ‘Big’, ‘Boys in the Better Land’ ou autres ‘Hurricane Laughter’ passent tout seul, et sont repris en choeur par un Fort Saint Père complètement conquis par Fontaines D.C, et bien arrimé dans la réalité après leur passage!

IDLES

L’énergie était telle pour le show des irlandais qu’on a même pas senti la transition avec Idles. Les cinq gusses de Bristol arrivent eux en terrain conquis. Révélation de la Route du Rock 2017, ils ont été à nouveau invités à semer le chaos dans la campagne Malouine.

On s’attendait à une grande java rock punk sauvagement débiloïde, on a été servis!

On était cependant loin de se douter que leur concert serait bien au dessus de tout ce qu’on avait pu voir ou entendre d’eux. Déjà parce que Joe Talbot et le public se sont mutuellement vociféré des « I’M SCUUUM » ou « DANNY NEDELKO-OO » plus fort que d’habitude. Parce que, Mark Bowen qui perd son futal dans la fosse et Lee Kiernan sa guitare, c’est rock. Et puis, Fontaines D.C. au complet qui les rejoint sur scène pour un morceau final d’anthologie, ça a franchement de la gueule.

Concrètement, après le concert on était dans le même état que le mec dans leur dernier clip de ‘Mercedes Marxist’.

 

TAME IMPALA

La pluie était attendue sur le festival dès le Jeudi soir, elle a en effet bien arrosé le site. Point d’eau sur nos têtes à la nuit tombante, mais une averse de confettis. Tame Impala arrose généreusement au ventilateur géant la dizaine de milliers de joyeux drilles qui s’ébattent devant eux. Transformant rapidement le ciel en une trombe multicolore qui emporte avec elle tout obstacle à la rêverie.

Entre ça et leur show pink floydien composé de lasers balayant tout le site et plongeant les spectateurs en transe, les Australiens ont assuré le show et leur statut de tête d’affiche.

Grandiose. Les ‘Borderline ‘et ‘Feels like if we only go backwards’ chauffent toujours autant le coeur. Tout comme un monumental ‘Elephant’ chauffe toujours autant à bloc les vagues de public qui ondulent au gré du psychédélisme solaire déployé par Tame Impala.

Et le déluge de couleurs sur scène comme dans la voix cosmique de Kevin Parker emmène toujours autant l’âme dans de multiples dimensions qui se dédoublent, s’entremêlent, le long des innombrables projections lumineuses, et finissent par se muer en un tout lucide et dans lequel se fondent les festivaliers.

 

BLACK MIDI

© Nicolas Joubard

Black Midi, ce sont quatre cowboys londoniens qui emploient le math rock sauce post punk comme il faut remodeler la géométrie de tes oreilles. Dans le Far Ouest français, ils se sont chargés de ramener le troupeau égaré par les rêveries Tame Impalesques au cheptel du Rock qui cogne. La performance du groupe est cinglante, celle du chanteur délicieusement arrogante, et la batterie, surpuissante.

© Nicolas Joubard

Côté son, on hésite entre l’impression d’être derrière un concorde au décollage, ou le sentiment que l’orage qui se déchaîne sur scène va provoquer l’arrivée de trombes d’eau d’une minute à l’autre. C’est du fort, du brutal, et on reste scotchés devant par un ‘Ducter’ qui n’en finit pas.

 

Bonus live

En bonus, le live Arte de Lena Willikens, beaucoup plus sombre et explosif que ses sons habituels. L’Allemande a fait trembler le Fort Saint Père pour en presser toute la pulpe Rock jusqu’à la dernière goutte et jusqu’à la dernière heure de la nuit. Pour nous c’était bien vaporeux, mais des limbes nous reviennent le sentiment d’être devant le plus grand moment du festival. La vidéo confirme.