Parce que le bon groove dépasse les barrières du confinement, on est allés écouter celui que chante Péroké, drôle d’oiseau musical à deux têtes. D’un département bientôt marqué « Vert » à l’autre, rencontre par écrans interposés de ceux qui viennent tout juste de sortir (le 24 Avril) leur premier album : ‘Tropism Animalis’.
Depuis la sortie de ‘Camel Race’, teaser tout en chaleur de l’album, on piaffait d’impatience de savoir ce qui allait pouvoir sortir de leur bec! Superbe résultat, pour un voyage haut en couleurs dans lequel le groove des traditions sonores africaines prend son envol avec les pulsations de la scène électronique européenne. Fred Guillon et Sylvain Rousselle font faire la grande migration aux tropiques pour mettre de la chaleur dans les hochements de tête instinctifs que génère chacun de leurs morceaux. Dix tracks à tropismes pour se transformer en animaux et rejoindre l’oiseau indépendant Péroké dans sa voltige, hors de sa cage!
Bonjour à vous deux! Avant de commencer, pouvez-vous nous indiquer qui s’occupe de quelle partie musicale dans le groupe?
Sylvain : Je joue essentiellement des claviers et synthés dans le duo sur scène.
Fred : Je m’occupe plutôt de la programmation. J’enregistre pas mal Sylvain qui a plus un niveau en tant que musicien et pianiste. Ca me permet de faire pas mal de samples, à partir desquels je monte des morceaux et des rythmiques. On avance comme ça tous les deux, en se faisant des passes de ping pong!
Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Fred : On s’est rencontrés dans un groupe d’afrobeat tourangeau qui s’appellait Rytmetix, en 2012…
Sylvain : Avant ça, en 2003 !
Fred : Ahah, on oublie ! On est des quarantenaires, mais j’ai l’impression d’avoir 30 ans! Quand Rythmetics s’est arrêté, j’ai continuer à travailler sur des productions électro, et j’ai demandé à Sylvain de me rejoindre.
D’où est venu le nom Péroké?
Fred : On cherchait un nom qui sonnait tropical, parce que quand on a monté le projet en 2016, on mélangeait énormément l’électronique et l’afrobeat.
Sylvain : Un nom chaleureux et facile à retenir !
Fred : Avec cette faute d’orthographe volontaire pour pouvoir nous retrouver facilement sur Google. Pendant un certain temps on tombait quand même surtout sur des vidéos de perroquet qui parlent…
Il y a pas mal d’influences dans votre musique. Avez-vous voyagé pour les ramener et les mixer avec votre musique?
Sylvain : En ce qui concerne les influences, j’ai écouté beaucoup d’afrobeat quand on jouait dans notre précédent groupe. Surtout les séries Ethiopiques, qui ont bien influencé cette gamme qu’on utilise assez souvent dans nos morceaux.
Fred : Après, on a jamais vraiment voyagé. On est pas des diggers, on est pas à chercher les vinyles dans des souks africains. On écoute toujours beaucoup de musique et de styles. Je sais pas si c’est si nécessaire de voyager. C’est plus très écologique maintenant!
Sylvain : Le seul voyage qui nous a influencés, c’est celui via lequel on a ramené nos costards. Ils viennent du Vietnam!
Fred : Dans Rythmetics, il y avait un saxophoniste, qui maintenant habite là bas. Par hasard on s’est retrouvés à aller le voir, et à aller dans un village de tisserands. Je me suis dit que comme on savait jamais se fringuer sur scène, ça ferait bien la blague et de bons déguisements de s’en faire confectionner!
Dans le clip ‘Camel Race’, on voit que vos costards sont bien repassés ! Quelle est d’ailleurs l’histoire que vous montrez dans cette vidéo?
Fred : Sur l’année 2019, on s’est retrouvés à faire pas mal de dates, environ 40. Sur une telle tournée, il fallait bien prendre soin de nos costards, qui sont devenus peu à peu nos costumes de héros Marvel! On avait un pote qui nous suivait sur quelques dates, et qui s’est marré à faire un truc sur ces costards.
Sylvain : Le fil rouge du clip.
Fred : Communiste !
Sur votre nouvel album, « Tropism Animalis », il y a aussi d’autres morceaux marquants. « Jag Janjaal », qui comporte une forte dimension spirituelle, et « Yabaah », sur lequel les voix sont bien marquées. Comment avez-vous composé ces morceaux?
Fred : « Jag Janjaal » c’est un morceau qu’on a fait avec Tulika Srivastava, une chanteuse indienne. On avait déjà travaillé avec elle sur le précédent EP. C’est toujours chouette de travailler avec elle parce qu’elle a son influence indienne qu’elle maîtrise très bien et que c’est quelqu’un de particulièrement ouvert d’esprit.
L’histoire de « Yabaah », c’est celle de deux chanteuses arabes. On a travaillé un des refrains avec une des chanteuses, Anissa Bensallah, qui n’a pas eu le temps ensuite de travailler les couplets. L’idée c’était alors de chercher quelque chose d’assez traditionnel, que maîtrisait plus Hend El Rawy, égyptienne qui chante avec notamment Orange Blossom, que l’on a rencontré plus tard et qui a fait les couplets.
On a appris seulement par la suite qu’elles chantaient l’une dans un arabe littéraire et l’autre dans un arabe parlé. On s’est dits que le mélange et la collaboration marchaient très bien. C’est ce que l’on aime dans la musique, tenter des choses, faire des morceaux qui changent.
Vous avez d’autres collaborations en cours ou à venir ? Voire certaines que vous souhaiteriez faire?
Fred : Bonne question ! Il y a un morceau que l’on a pas mis sur l’album, parce qu’il claque un peu plus en mode coupé-décalé et qu’on garde donc pour les lives. On a fait un morceau avec des chanteurs maliens sur lequel il y a de l’autotune, qui nous plaît bien et qu’on sortira plutôt en single cet été.
Celles qu’on aimerait faire… Il y a Sofiane Saidi que je trouve super, ou les chanteuses d’AWA!
Toujours en parlant de collaborations, vous avez travaillé avec qui pour réaliser une pochette d’album qui claque comme ça?
Fred : C’est un rennais qui s’appelle Maxime Roy. On a tout de suite bien aimé son univers et on lui a donc proposé de bosser sur tout le hardwork de la com’ de Péroké. On lui avait fait écouter un peu les morceaux, ce qu’on aimait dans ce qu’il faisait lui, on lui a donné carte blanche et il a fait mouche à chaque fois dans ce qu’il nous a proposé.
Que représente cette pochette, au delà de ce qu’on voit ?
Sylvain : C’est une carte blanche, donc c’est son univers à lui qui l’a amené là dedans. Chacun peut voir un peu ce qu’il veut. Pour ma part, je vois plus un univers de fin du monde, ou de renaissance!
Fred : Ca illustre des points dont on est partis : le tropisme, la mutation entre espèces… Il y a aussi un regard sur la tête tranchée qu’on pouvait représenter, sans parler de la période actuelle, comme l’économie ou les êtres humains dans une sorte de désert… C’est la première idée qu’il a proposé et pour laquelle on a tous fait « WOW, nickel! » On lui a juste demandé d’enlever les nuages dans le ciel, mais c’est tout.
En parlant de Rennes, vous êtes passés aux Transmusicales en 2018, c’est apparemment un souvenir marquant pour vous ?
Sylvain : Oui, c’est un des plus beaux concerts qu’on ait faits. Avec un super public, un super accueil et une scène énorme, et surtout une belle after. N’est-ce-pas Fred?
Fred : Ahah oui! En tous cas quand tu te dis que tu vas jouer aux Trans’, tu espères que tu vas pas te planter! Ca faisait longtemps que j’avais pas eu cette impression. Tu sais, comme quand c’est ton premier concert ou que tu vas passer ton permis de conduire. Et c’était donc agréable d’en sortir en vainqueurs!
Tous les artistes qu’on a interviewés et qui sont passés aux Trans’ ont eu un super feeling avec Jean Louis Brossard, le programmateur du festival, c’est votre cas aussi?
Sylvain : Oui! Quand on a fait les Inouïs du Printemps de Bourges, plus tôt la même année. il est directement venu nous voir à la sortie du concert pour nous proposer de faire les Trans’. Il avait vraiment bien apprécié ce qu’on avait fait!
Fred : Il est incroyable, il est rentré dans notre loge et nous a attendus le temps qu’on range notre matériel! T’as l’impression que c’est un peu ton impresario, que t’es Mick Jagger d’un coup!
Sylvain : C’est vrai qu’il te saute dessus!
Fred : T’as l’impression qu’il va t’emmener au sommet ! Plus tard, tu te rends compte que ce n’est que Jean Louis Brossard. Il est vraiment super, mais c’est pas lui qui va faire ta carrière.
Ca vous a mis un coup de boost’ les Transmusicales ?
Sylvain : Oui complètement ! Vu qu’il y a beaucoup de programmateurs qui viennent au festival, il y a eu beaucoup de dates dans l’année qu’on a eues grâce aux Transmusicales. Mais aussi grâce aux Inouïs du Printemps de Bourges.
Fred : On a aussi la chance de n’être que deux sur la route, de ne pas prendre beaucoup de place et de ne pas trop manger. Les programmateurs ne prennent donc pas trop de risques à nous inviter, surtout en ayant le sceau Transmusicales et Printemps de Bourges.
Y a t-il des dates qui vous ont marqué depuis?
Sylvain : Il y a un festival que j’avais beaucoup aimé, le Festival en Othe. On avait caillé ! Quand tu pars de Tours c’est l’été, mais quand tu arrives là bas c’est encore l’hiver, surtout la nuit Je n’avais pas prévu ma doudoune comme Fred. Une année ils avaient même eu de la neige! Mais l’accueil était super, toute la journée, très chaleureux!
Fred : Pour ma part j’ai bien aimé Chauffer dans la noirceur, en Normandie. On jouait dans le petit chapiteau, le troisième oeil, celui des chéper, donc c’était bien cool! Tout le monde était vraiment bien énervé, ça dansait sur les enceintes!
Sylvain : Tu as justement pas mal d’images de ce festival dans le clip de ‘Camel Race’.
Auriez vous des groupes à nous faire découvrir ?
Fred : Oui, j’ai en tête un groupe de rock assez énervé, les Stuffed Foxes, qui est vraiment bien.
Et un autre qui s’appelle NOUR, qui est super!
Que diriez-vous sur l’album « Tropism Animalis »?
Sylvain : L’album a une bonne cohérence d’ensemble. On a gardé notre touche avec nos mélodies et nos influences orientales et éthiopiennes avec derrière une rythmique et un groove plus électro. Il n’y a plus la batterie acoustique ni les cuivres comme il pouvait y avoir sur les premiers EP. Il y a toujours cette chaleur apportée par les gammes et les voix qui viennent de l’orient ou du maghreb.
Fred : On a essayé de rétrécir le panel des sons qu’on utilise, de resserrer le propos. On a fait un gros travail avec l’ingénieur du son, Damny Baluteau, sur chaque kick, chaque snare ou autre pour, dès la composition, avoir le son qu’on voulait. On va encore pousser Péroké dans ce sens là et celui des collaborations pour qu’il trouve sa griffe!
Sylvain : Son bec !
Question plus « Konbini » pour finir: quel est le premier truc que vous ferez à la fin du confinement ?
Sylvain : Aller boire une pression dans un bar avec des potes !
Fred : Faire une grosse fête avec des potes !
Tu m’étonnes! On ne peut que vous souhaiter de pouvoir le faire rapidement. D’ici là, merci pour l’interview!
Fred : Merci de même ! On tient aussi à remercier spécialement Gaëtan, notre manager, et Fred, le D.A. du label Ovastand, avec qui on se marre bien et qui nous ont bien aidé à faire ce disque!
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