A l’occasion de la sortie de Central Park La Fontaine, nouveau titre de Les Louanges, hommage au parc emblématique de Montréal qu’il pouvait voir de son balcon en composant la track, nous vous proposons l’interview effectué en mars dernier avec Vincent Roberge.

Ce titre au refrain bien catchy se distingue par l’utilisation discrète d’un peu d’autotune et surtout de cordes, une première sur la feuille de route de l’artiste. La chanson en diptyque commence par une première partie très calme, sans batterie, introspective en pizzicato synthétique. L’entrée des drums et de nouvelles harmonies au milieu du titre vient magnifier la topline refrain, un deuxième tableau de la pièce s’offre à nous. Pour un finish totalement exaltant dont les violons donnent le top départ suivis des vents et des cuivres avant la ligne d’arrivée.

Vincent nous avait justement fait la confidence en mars dernier qu’un nouveau titre était dans le fourreau prêt à être dégainé.
Baggy noir, sweatshirt
Domi & JD Beck, Blue Hair, Vincent Roberge, cet introverti repenti comme il le dit lui-même m’accueille dans le hall de l’hôtel Ibis en ce 15 mars 2023, la veille de son concert au Trabendo. Il s’accorde une journée de repos après un concert donné la nuit précédente au Botanique à Bruxelles.
Au cours de nôtre entretient nous abordons son adolescence à Lévis au Québec, ses influences, son dernier album Crash, sa manière de composer et d’écrire entre autres…

C’était quoi l’adolescence de Vincent? Il y a des épisodes qui ont marqué tes chansons? Comment est née ton envie de composer des chansons?

Ben en fait, c’est pas compliqué j’ai toujours fait de la musique, j’ai toujours voulu faire ça. J’ai commencé jeune à apprendre la musique. Mes parents sont deux graphistes mélomanes qui m’ont eu à 23 ans, ils ont toujours été super enclins à me laisser faire et à m’encourager la dedans. J’ai été bien chanceux à ce niveau la. Vers 15 ans j’ai du commencer à écrire mes premières chansons après ça j’ai eu plusieurs groupes. J’ai étudié le jazz, à l’équivalent d’un conservatoire. Guitare jazz. J’ai foncé la dedans et je me suis jamais donné de plan B. C’est pas compliqué, monoculture (rire).

Quel était le style de ton premier groupe?

Mon premier band on avait pas d’argent pour les micros et la carte de son. Ce qui fait qu’au début c’était de la musique instrumentale on trippait sur des trucs comme Primus. J’étais bien rock quand j’étais jeune.

Comment décrirais-tu ta musique? Je t’avais entendu parler de « r’n’b conscient » (rire de Vincent) est ce que tu saurais la décrire ou tu fais de la musique et tu vois ce qu’il se passe?

Moi le premier album que j’ai acheté dans ma vie c’est Demon Days de Gorillaz. Damon Albarn, sa manière de mener ses projets c’est vraiment un super exemple.
Ça fait longtemps qu’on me pose cette question et j’ai toujours tourné autour plus ou moins. Des fois j’ai dit du r’n’b alternatif mais bon… Un moment donné j’fais de la pop j’pense, c’est ça que je fais (rire).

J’ai l’impression qu’il y a vraiment ce mix entre musique rock/garage/grunge et influences très Jazz/r’n’b au Canada plus qu’en France. Tes influences penchaient plutôt de quel côté quand tu étais jeune?

J’ai écouté beaucoup de trucs. Moi j’aimais Queen Of The Stone Age. Sur mon album Cruze c’est un petit clin d’oeil à Feel Good Hit Of The Summer sur l’album Rated-R.
Ado, on écoutait de tout en fait ça allait du rock prog’ au rap. Odd Future j’ai grandi avec eux. Franck Ocean, Tyler, Earl Sweatshirt. Moi depuis les Odd Future tapes Vol 1, Vol 2 puis leur album, on se défonçait, on écoutait beaucoup ça!

Quel regard portes tu sur la scène musical Montréalaise ? Men I Trust, Hubert Lenoir? Il y a du respect entres-vous ou une sorte de compétition?

Moi je viens de la ville de Québec, la rive sud et Hubert aussi. Y a une grosse scène la bas. Y a tellement d’artistes, y a du talent partout autant à Montréal qu’à Québec. J’pense que c’est un p’tit monde.
Y a pleins de groupes et d’artistes avec qui je suis arrivé, on jouait dans des petits bars et puis à un moment donné on a commencé à faire des plus grosses salles… C’est cool, on vieillit ensemble.

T’as aussi tout le côté anglo de Montréal, Arcade Fire, Godspeed You! Black Emperor. Le rap au Québec aussi ça va bien. Mais ceux qui se parlent moins j’ai l’impression c’est les anglo et les franco. C’est comme deux mondes différents, tu sors dans différents endroits.
Mais en même temps c’est petit, au total dans la province tout le monde finit par se connaître. Puis après dans le monde et l’industrie de la musique tout le monde se croise. Puis en même temps ça fait déjà longtemps qu’il y a des groupes de malade qui existent ce qui fait que j’pense que je suis aussi tributaire de tout ces gens la. Y a aussi des gens qui étaient des idoles qui maintenant sont des amis.

Genre qui ?

Ben genre Klô Pelgag. C’est la seul Québecoise à avoir une review par Anthony Fontano, et il lui a donné une belle note en plus. Je me fais aussi texter par Daniel Belanger puis les gars de Alaclair Ensemble. Ce sont des mecs avec qui je collabore, ça c’est cool.

En fait j’ai rencontré tout les gens qui m’ont influencé de près ou de loin. Puis je m’entends bien avec tout le monde, c’est vraiment cool. Y a ce côté là au Quebec, on est sur notre petite île, c’est sûrement plus tranquille à Montréal qu’à Paris. Au niveau des requins.
J’pense aussi que le fait d’être comme un peu un petit village gaulois, c’est très apprécié et recherché d’avoir des gens qui essaient de se différencier un peu. Ça crée un son qui n’est pas homogène ou justement la différence puis les expérimentations sont soulignées et appréciées.

Tu viens de collaborer avec Ichon, (Sur la mélodie) peut-tu nous parler un peu de cette rencontre? Tu suivais déjà son travail?

Ben j’avais loué des studios ici, en 2021 et je rencontrais des artistes. Y’avait une compagnie de distribution dont j’ai oublié le nom. Je leur ai juste dit que j’aimais beaucoup ce qu’il faisait. Ils lui ont glissé le mot puis lui ma musique lui a plus. La première fois qu’on s’est rencontrés c’était en studio, c’était pour cette chanson là (Sur la mélodie) que j’avais commencé dans mon Airbnb sur mon laptop, avec mon synth’.

Tu avais déjà une base de prod’?

Au début on devait partir de A à Z et finalement il aimait bien ma prod’ donc on est partis dessus. Après ça m’a pris 40 000 ans à finir ma chanson, j’ai testé sa patience (rire).
Puis je suis passé chez lui l’automne dernier pour terminer ça et ensuite tourner le clip. Ça été une belle expérience. C’est cool car j’ai de la difficulté à faire des collab’ dans la vie. Mais c’était un bel exercice de faire ça avec lui. Ce gars est tellement incarné.

Incarné?

Quelqu’un d’incarné c’est quelqu’un pour moi qui est définitivement lui même. Ça peut pas être autre chose que lui. Il a l’air bien avec ce qu’il est. Il parle fort, il est présent. Il sait ce qu’il veut, il sait ce qu’il aime, il sait ce qu’il n’aime pas.

Ça c’est cool pour une collab’ !

Ouais… mais moi je suis quelqu’un qui cherche souvent plus le compromis des fois. Je suis un introverti repenti t’sais. Ça fait que c’est cool de travailler avec quelqu’un qui est lui même aussi. Mais en même temps toutes les collab’ que j’ai fait c’est toujours avec des gens qui m’apportent ailleurs. Ça a toujours été des gens avec des personnalités forte. Je dis ça dans le bon sens du terme. Corneille aussi c’était pas compliqué. C’est bleu, c’est rouge, on y va, c’est efficace.

Y a-t-il d’autres artistes Français avec qui tu aimerais collaborer? Ou que tu écoutes ou que tu aimes?

Y’en a pleins. J’aime beaucoup Benjamin Epps. J’aime bien ce qu’il fait. Ya l’Impératrice dont j’ai fait la première partie au Zénith ce printemps. On s’est échangé des fichiers…
Sinon heu… j’ai invité hier à mon concert Flavien Berger, j’aimerais bien le rencontrer, j’aime beaucoup ce qu’il fait.
Et peut être si j’ai le temps, on voudrait se capter avec Voyou.

Corneille il représente quoi pour toi? Il connaissait ton travail? Peux tu nous parler de cette collab‘ ?

Corneille autant pour les français que les Québécois il était omniprésent, c’était une icône et ça l’est encore. C’est un vrai prince. En personne il est vraiment cool, il est professionnel, il est gentil, il sent bon (rire). En studio, il est fort aussi, il est venu faire en deux heures tous ses back vocaux, c’était plié. Et le couplet il a fait ça de son côté et il me l’a envoyé. Il a écrit les paroles avec sa femme en plus, de son couplet .

C’est toi qui l’avait contacté au départ ou ?

En fait on s’est rencontrés dans un parking.

Ha ouais ? Belle anecdote (rire)

Ouais haha un parking de studio. J’étais en train de terminer l’album de Crash. Ça faisait longtemps qu’on faisait des blagues, justement avec mes jokes de r’n’b conscient on était comme « c’est qui le king du r’n’b conscient? » ce serait Corneille.

Jamais j’osais penser que je pourrais faire un featuring avec lui. Puis finalement y a un matin on était en train de mixer l’album (Crash). J’avais une chanson pas mal puis la c’était genre : « Ok deuxième album tu es assez reconnu, on peut penser au moins à essayer d’attirer son attention, puis lui demander une collab’ et lui envoyer de quoi ». Et finalement ben c’est lui qui m’a trouvé dans un parking un matin. Un parking de studio où on faisait du mix. Il m’a appelé en sortant de sa voiture genre « Est-ce que c’est toi les Louanges » ? Il m’a dit qu’il était fan de ce que je faisais depuis 2017. Et qu’il avait déjà tweeté que j’allais être le « next big thing ». Mais moi j’avais pas twitter.

Corneille qui est fan de ton travail ça doit être un délire.

Ouép. Je lui ai parlé de l’album, il a full connecté avec le sujet. Mon couplet était même pas écrit vraiment, je crois même pas qu’il y avait mon refrain. Mais je lui avais envoyé l’instrumentale. C’est juste que je lui avais parlé de l’album puis il est arrivé lui avec son couplet. Et ça fonctionnait super bien en fait. C’est fou il a compris. Il a vraiment compris avec une discussion ce que je recherchais. Finalement c’est des trucs qu’il avait vécu lui aussi dans le fond. L’album 2 c’est un album qui relate un peu les péripéties suite au première album qui a changé ma vie.

Oui tu en parles beaucoup dans Crash.

J’ai pas fait la tournée des Zénith mais quand même. Ma vie a quand même changé, pas au même niveau que lui mais la dynamique était ressemblante. Donc il a bien compris et il a essayé d’encapsuler ça. Ça été cool, et par moment il m’a bien conseillé. On se voit pas beaucoup mais les fois où on s’est vus et ou on a passé du temps ensemble ça été super formateur.

Vous parliez musique ou d’autres choses?

Plus de la vie. Y a pas de manuels d’instruction avec le job que je fais, la seul manière c’est de poser des questions à ceux qui l’ont fait avant soi.

Dans ton court métrage un moment tu dis « la musique pour moi c’est un peu comme n’importe quel autre job sauf que moi faut que je compose des accords et que j’écrive des mots » (rire de Vincent).

Tu te vois un peu comme un artisan?

On est pas en train de faire de la saucisse, mais pour faire des choses bien, il faut travailler. J’pense que les meilleurs dans tous les styles, tous les genres confondus c’est des gens qui étaient appliqués. C’est dans cette idée là de dire que tu travailles pour ça, tu sépares un peu l’égo de la musique. Parce que pour moi la musique c’est important. C’est pas d’être populaire, c’est pas de fonctionner. T’façon si mon but c’était d’être vraiment populaire puis de faire de l’argent, d’être vraiment riche je f’rais pas la musique que je fais non plus. J’aurais sûrement pris quelques raccourcis (rire).

Comment se passe le processus créatif? Tu fais tes compo’ solo et ensuite tu les fais vivre avec tes musiciens? Ou est-ce que vous composez à plusieurs?

Moi je fais ça tout seul. Genre 60% de l’album c’est moi avec mon ordi. Après j’arrive avec les chansons, je travaille ça avec Félix (Petit, acolyte et co-réalisateur) qui est vraiment mon bras droit là dedans. Il réussit à terminer les idées que j’arrive pas à terminer. C’est lui qui a toujours l’oeil pour regarder les choses d’une manière dont personne les regarderaient. C’est comme si on regardait pas le même bleu. Ça c’est malade.

On dit la co-réalisation c’est pas mal, car moi je suis investi dans le process de A à Z jusqu’au mix, jusqu’au master. Et j’ai mon mot à dire sur tout ce qui est au mix. Puis quand les tunes sont finies on choisit sur lesquelles on apporte le band. Y a des chansons sur lesquelles ça devient une évidence. Après on enregistre tout ça et quand on arrive au mix je suis là à chaque session, j’ai une bonne relation avec mon mixeur. Même au mix on est encore en création, on fait du patchwork, on change des trucs on fait des gros moove bold. J’aime beaucoup travailler à la fin au mix, des fois on change des structures on coupe des trucs on fait de l’arrangement.

Sinon niveau texte, mon processus d’écriture j’arrive pas à comprendre comment il fonctionne encore. J’vois ça comme un photographe animalier qui doit trouver le toucan dans la forêt. L’inspiration tu attends de la trouver, tu restes à l’affût puis tu cherches ton toucan avec l’appareil photo puis à un moment donné, il passe.

Tu écris par rapport à des expériences personnelles qui t’arrive ou ça peut être des choses que tu vois à l’extérieur?

Ça dépend. Le première album c’était beaucoup de l’exploration poétique, avec de la fiction. Tandis que le deuxième j’avais une vie sur laquelle j’avais des trucs à dire.

Toujours dans ton court métrage tu dis « un peu de douleur des fois ça fait une bonne chanson ».

J’ai déjà lu quelque part que si tu veux faire pleurer ton lecteur il faut que l’écrivain ait fini de pleurer. J’pense pas que c’est nécessaire mais j’pense que pour écrire quelque chose qui va toucher faut qu’il y ait une empreinte forte, c’est sûr. Après est-ce que tu as besoin d’être torturé pour être un bon artiste… ça fait longtemps que Les souffrances du jeune Werther on été écrit… C’est la beauté du job que je fais, j’peux prendre ce qui me rentre dedans fort puis le transformer en quelque chose qui va payer mon loyer (rire).

Quel est ton rapport avec la langue française? Et pourquoi le français plutôt que l’anglais?

Ben c’est pas compliqué, je me lève le matin, je vais me coucher, je ris, je pleure en français, j’vois pas pourquoi je chanterai en anglais.

Certains disent en France qu’ils ont du mal à faire sonner la langue française…

Ouais mais ça c’est n’importe quoi. Ça c’est des gens qui ont peur. C’est juste qu’il y a moins d’exemples, la musique pop aujourd’hui c’est américain. C’est normal qu’il y ait plus d’exemples en anglais mais le français c’est tellement riche comme langue. J’pense que j’ai une certaine chance aussi d’être Québécois parce que nos mots on les rapetisse, ils sont plus percussifs.

Aussi je respecte trop le médium puis les lettres. C’est déjà compliqué d’écrire une chanson puis d’écrire quelque chose qui ait une valeur poétique. Et il faudrait que je sois vraiment parfaitement bilingue pour le faire en anglais.

Tu t’inspires de lecture dans ton écriture?

Oui j’ai toujours aimé lire. J’me souviens être petit 12, 14ans, en cours de français les autres faisaient des exposés sur les livres jeunesse puis moi j’étais déjà sur La Métamorphose de Kafka.
J’ai fait une session littérature à l’université. Mais je lis pas beaucoup ces temps ci, ça me manque un peu.
Pour écrire des mots c’est bien que tu en aies lu un peu.

Le succès de ton première album La nuit est une Panthère, comment ça a changé ta vie?

Ben j’étais en train de vendre mes guitares pour payer mon loyer, puis j’ai eu mes premiers chèques substantiels grâce à la musique. C’est sûr que l’autonomie financière, c’est assez nice. J’ai toujours été autonome, mais la plus être complètement broke c’est quand même nice (rire).

C’est pas compliqué en fait, j’ai atteint mon rêve de p’tit cul. C’est ce que je voulais faire dans la vie. J’ai tout fait dans la vie pour me rendre là où j’en suis. C’est à dire de travailler de ma passion, écrire des tunes, produire de trucs. Vivre une vie qui est en dehors du cadre normal.

C’est un pari au début donc tu es content quand tu y arrives.

Ouais. J’ai pu rencontrer tous les gens que j’admirais, pour qui j’avais du respect en musique au Québec. Y a pleins de choses qui ont changées. J’suis pas une méga star mainstream mais maintenant je me fais arrêter dans la rue, je me fais regarder, j’me fais googler en pleine face. C’est sûr ça, ça a changé. Ça fait drôle de faire partie de la clique des gens qui se retrouvent dans la télévision, dans la radio. Mais en même temps je continue à vivre dans un appartement avec des potes à moi d’enfance.

Tu as pas pris la grosse tête?

Non pour le moment j’pense pas.

Dans le titre Pigeons tu t’interroges sur l’écart entre l’idéalisation de la vie d’artiste et ce qu’il en est réellement « Nomade maintenant mode de vie normale / Maussade parfois les couleurs du voyage / La tournée altère le sens de la morale / Best Life parfois s’apparente aux mirages » . Alors c’est quoi la vie de Vincent en dehors des tournées? beaucoup de studio?

Cette chanson là, ça parlait du fait d’être tout le temps parti. C’est une vie de nomade. L’année passé j’ai fait près de 60 shows. Cette chanson là parle beaucoup du retour en fait. A un moment donné tu n’as plus des horaires, un train de vie qui fit avec les gens autour. Y a des gens que des fois tu laisses derrière un peu.
Mais en même temps, j’essaye quand ça redevient plus tranquille d’être assez fidèle dans mes amitiés. Même avec les gens avec qui j’travaille.
J’suis un bon rat de studio ça c’est sûr aussi, quand je suis pas en concert.

J’ai l’impression qu’il y a eu un virage avec des sonorités plus 80’s, des synthé FM et plus de boites à rythmes dans Crash. C’était une volonté de ta part d’avoir ce son la? Ou ça s’est fait au fil du mix et du processus créatif?

Moi mon but c’est toujours d’essayer de pas me répéter. Tous les gens que j’admire se sont jamais trop répétés. Mais en même temps c’est rare que j’ai un plan de match clair. J’trouve que ça tue un peu l’inopiné. Ce que je savais par contre avec cet album là c’est que je voulais faire quelque chose de plus concis. Réussir à synthétiser le plus possible les progressions d’accords, les arrangements, le texte. Puis c’était juste la vibe i guess.

C’était vraiment un soucis d’essayer de faire comme un grand sudoku en fait.

Qu’est ce que tu veux dire par la?

Ben justement la synthèse essayer d’aller au fond des trucs, garder l’essentiel. Pas trop se perdre dans des flafla et faire quatorze mille accords compliqués puis douze mille métaphores.
J’ai écouté beaucoup Sign ‘O’ the Times de Prince aussi à cette époque.

Toi qui viens plutôt de la guitare est ce que tu aimes le monde des synthétiseurs?

Absolument j’passe ma vie à faire des clip bloup blop.

T’as des synth’ références  que tu kiffes ?

Prophet 6, je l’ai remboursé en mars. C’est la dessus que je travaille.

T’as des projets futur dont tu peux me parler?

Oui il va y avoir une nouvelle chanson le mois prochain (Central Park La Fontaine). J’voulais faire un album delux qui s’est pas fait qui devrait arriver. Peut être y va arriver un jour. Y a des chansons dans des disques durs (rire).

Dans le titre Chaperon tu mets la focale sur les violences faites aux femmes, c’est un problème qui te touche? Tu penses que la nouvelle génération sera plus sensible à ces questions la et qu’on peut être optimiste pour l’avenir? Et plus largement comment tu conçois le militantisme dans la musique?

J’pense que c’est un beau médium pour passer des messages la musique. Mais surtout dans mon cas je veux pas que l’intention prenne sur la forme. J’trouve que des fois c’est ça qui rend ça moins intéressant une chanson, c’est trop militant parce que ça se veut militant, on perd un peu la sensibilité de la création.

Mais t’sais cet album Crash, chaque chanson c’est un moment fort dans ma vie durant les deux dernières années. Ça m’a touché parce que ça m’est arrivé. On a vécu ça dans notre appartement, c’est la copine de notre coloc’ qui s’est faite violée. Y’avait pas de plan d’essayer de se positionner, c’est juste arrivé, donc j’en parle.

Après c’est sûr que ça peut aller de mieux en mieux. Mais c’est jamais gagné. J’pense qu’on fait des avancées mais il faut toujours faire attention. Les gens semblent se radicaliser aussi. Autant qu’il y en a qui continue à aller super loin et à être de plus en plus ouvert y en a d’autre qui se referme de plus en plus.

Ça se polarise.

Ouais ça se polarise plus que radicalise. J’ai aucune idée de comment régler tout les problèmes mais ce que je prône c’est un peu de sensibilité. Si je prône un truc ce serait la sensibilité et la sensibilité c’est écouter, c’est regarder, c’est se remettre en question, prendre le temps de comprendre, j’espère que les gens vont garder ça.