À l’occasion du Biches festival, les pieds bien ancrés dans la terre et la tête sous les arbres, caressant les feuillages de notre cuir chevelu, nous avons discuté gaiement avec Tristan Thomas et Tino Gelli, les deux musiciens qui portent la parole de Walter Astral, ce druide évanescent qui leur est apparu dans un rêve fugace et exclusif.

Nous avons discuté de leur rencontre, de leurs inspirations, mais aussi fantasy, instruments magiques et druidisme. Ils nous ont même donné la recette du succès à la sauce Walter Astral…

Hier sortait le clip de leur dernier titre en date Mirage qui laisse entrevoir encore un peu plus de leur univers à travers ces animations qu’ils ont réalisées à deux.

Listen Up : Si vous deviez décrire votre projet en un mot pour ceux qui ne vous connaîtriez pas encore ?

Tino : Techno-Banjo-Druide, ça nous plait bien car ça montre bien tous les aspects du projet en très peu de mots, c’est efficace.

Tristan : Cyber-Terroir en un mot, c’est un néologisme. Comme Hyper-druide.

Listen Up : Ces gammes orientales dans votre musique, ce sont des influences qui sommeillent en vous depuis longtemps?

Tino  : Oui carrément, notamment dans le cinéma où c’est beaucoup utilisé, ce qu’on appelle la double harmonique majeure.

Tristan : On s’est bien passionnés pour toutes ces gammes, la gamme Hongroise vachement utilisé par Dany Elfman, par Sati, ce sont des gammes qui donnent un truc très cinématique à toutes les mélodies. Ce qui est très intéressant dans ces gammes c’est qu’il y a autant un truc joyeux et réconfortant que quelque chose de très tendu qui peut amener un univers d’aventure, ça résonne avec pleins de choses qui en musique sont très agréables à écouter ou à explorer.

Tino  : Pour rentrer dans le technique, il y a souvent des rapports de demi-tons dans les différents degrés de ces gammes, et ce sont souvent ces espèces d’accidents dans la montée harmonique qui créent des frottements, des tensions un peu imprévisibles à l’oreille. Pour les références ça peut être King Gizzard, Altin Gün…

Tristan  : Après c’est les seules gammes qui demandent pas d’avoir du microtonal, on a pas encore les moyens car on n’a pas encore d’instruments microtonaux, on aimerait y aller doucement…

Listen Up: A travers quel instrument?

Tino  : La on a kiffé un truc de ouf!

Tristan  : Franchement c’est la folie, on voudrait customiser notre Banjo “Banji”, on a vu qu’ils vendaient des plaques en plastique que tu mets sous tes cordes et du coup ça devient fretless, et donc la tu rentres dans le délire du microtonal en une seconde. Bon après faut avoir vraiment l’oreille, mais du coup ça t’ouvre vraiment le champs des possibles…

Tino (Banjo man) : Ça se bosse de ouf, parce qu’en fait vu que c’est transparent tu peux encore apercevoir tes demi-tons derrière et du coup tu peux vraiment bien te positionner, c’est pas comme un violon où la moi ça m’angoisse.

Listen Up : Ça va être Pimp my Banji quoi!

Walter Astral : Exactement haha.

Listen Up : Racontez-nous l’histoire de Banji.

Tristan  : Et bien Banji il a appartenu à mon papa. C’était l’instrument le moins cher et celui qui faisait le plus de bruit pour faire la fête. Il passait au-dessus de tous les gars qui faisaient de la guitare acoustique sur la plage, il arrivait avec son Banjo et c’était genre : “Ok, c’est la fiesta”. Et cet instrument pendant trente ans il est resté dans un grenier abandonné et c’est quand on a commencé à jammer tous les deux, qu’on a essayé tous les instruments qu’on avait autour de nous, on a même sorti une sitar.

Tino : On a vraiment exploré tous les instruments qu’on avait à disponible et en fait le Banjo on était la : “putain, fuck yeah”.

Listen Up : Vous avez chacun vos différents projets, comment vous êtes vous connectés sur Walter Astral ?

Tristan : Ça a commencé avec les confinements. On est partis à la campagne, à la base on s’est dit qu’on allait rester un mois, mais finalement on est resté 7 mois là- bas. Au début on faisait chacun de la musique pour soi, Tino c’était pour Polycool et moi pour mon projet solo Ovhal44 et puis naturellement sans jamais se dire “on va se lancer dans un projet tous les deux”, ça s’est fait. On était deux musiciens dans la même salle au bout d’un moment on a commencé à jammer ensemble.

Tino : On avait nos deux studios dans la même grande pièce.

Ici nous nous devons de faire une pause. Nous avons demandé à Walter Astral de nous décrire leur processus créatif lorsqu’ils crééent des morceaux et ces derniers nous ont généreusement ouvert leur grimoire et laissé jeter un œil à leur recette magique…

 

Listen Up : Dans les chansons que vous avez faites il y a à la fois du Ovhal44 et du Polycool, à quel point est-ce que vous implémentez ces racines dans Walter Astral ?

Tino : Je crois que ça se fait naturellement, on kiffe tous les deux nos origines respectives de musique et je pense qu’on a tout les deux envie de faire ça et puis en fait on commence à comprendre cette jauge la un peu dans Walter, comment cuisiner le truc quoi.

Tristan : C’est comme une recette de cuisine qui nous est tombée dessus et maintenant on commence à se dire, “Ah ouais attends on réutilise cet ingrédient là, il nous plait bien!” mais de base c’était pas très réfléchi.

Tino : En fait Tristan passe beaucoup de temps à la prod donc il va en ressortir cet englobage ultra électronique, techno et derrière on kiffe bien mettre des guitares et on aime bien faire des mélodies pop donc en fait ça marche bien comme ça, on va tirer la corde un peu chacun de notre côté quoi.

Listen Up : Et cette histoire de druide et des quatre éléments, comment ça vous est venu ?

Tristan : Il y avait quelque chose d’à la fois fun et à la fois profond, un peu comme ce qu’on aime être dans la vie de manière général. Et durant le confinement la vie s’est vachement ralentie et on était beaucoup plus proches de la nature tout simplement. C’est quelque chose qui nous a fait beaucoup beaucoup de bien et qui nous a inspiré. Le morceau Le feu on parlait vraiment à la base de ce poêle où tous les soirs c’était un rituel, on devait aller chercher le bois, faire ce feu sinon on crevait de froid.

Tino : On faisait que ça presque. 

Tristan : (rire) On faisait que ça de nos journées. C’était ça, de la musique et puis profiter de ce qu’il y a autour de nous. Et en fait voilà de ces éléments là qui étaient essentiels, on a pu insuffler à l’intérieur de nos textes des trucs qui parlent de l’humain et qui parlent de notre condition de ce que c’est que d’être vivant etc… Et à la fois ya aussi quelque chose de fun, de magique, on est aussi des gros fan de Donjon et Dragons et de tout ce qui va être dans cet univers.

Tino : (chuchote) Des cartes magic…

Tristan : (rire) Des cartes magic, le seigneur des anneaux on est des gros fans, fin tout ça et donc le druide c’est aussi ça tu vois, c’est aussi tout ce pan un peu merveilleux.

Tino : C’est la French touch de la fantasy (rire).

Listen Up : Ce sera le titre (rire).

Tristan : Les druides French touch de la fantasy ! (rire)

Tino : Va falloir qu’on fasse la B.O du Donjon et Dragon 2 au cinéma !

Listen Up : Du coup pour rebondir un peu la dessus quand on arrive avec un concept et une thématique aussi forte et aussi identifiable avec le premier EP comment est-ce qu’on fait pour aller au-delà, pour rebondir ?

Tino : Mec, on fait rien, on fait plus rien mec.

Tristan : On va sortir que des remix (rire).

Listen Up : Va falloir créer de nouveaux éléments hein… (rire)

Tino : En vrai c’est une super bonne question parce que c’est un truc qui nous a taraudé de ouf, qui nous a même un peu angoissé.

Tristan : Ça nous a beaucoup plu de travailler avec une thématique hyper forte et puis d’un seul coup c’était fini, il y a les 4 éléments, on ajoute hyper druide et c’est bon quoi.

Listen Up : Ça donne une ligne de conduite d’avoir ça.

Tino : C’était hyper agréable, souvent on nous dit “mais c’était pas trop galère ?” au contraire nous ça nous a donné un cadre et en fait c’est super inspirant.

 C’est quand même hyper large tu peux interpréter l’eau, l’air, le feu comme tu veux quoi mais du coup ce dont on s’est rendus compte c’est qu’on aime bien raconter une histoire à travers un EP et du coup on va pas se restreindre à toujours être dans des thématiques mais par contre sûrement à toujours essayer d’avoir une expérience. La par exemple, tu vois on travaille sur un album vraiment concept avec des morceaux qui parlent du jour et de la nuit.

Tristan : Ça reste assez large quand même.

Tino : Oui on s’est pas bloqué à toutes les heures de la journée (rire).

Tristan : On a pas envie de rester un poil trop enfermé dans un storytelling pur et dur et de faire un album concept à la lettre mais plus de pouvoir à présent faire des chansons de façon plus large mais qui s’inscrivent dans ce rapport la un peu binaire (jour/nuit).

Listen Up : Dans votre storytelling vous avez plutôt eu l’idée de ce personnage druidique de Walter Astral ou des éléments ?

Tristan : Créer un univers c’est important et c’est sûr qu’il va y avoir des personnages et des histoires mais il faut que ça reste en second plan de la musique qu’on compose sinon ça va vite nous limiter.

Tino : Tout cet univers s’exprime plus sur scène où on a cette part de storytelling qui est importante mais après dans la musique qu’on fait on veut que ce soit quand même une vrai expérience musicale plus que de faire un Donjon de Naheulbeuk (rire).

Tristan : La tribu de Dana (rire). Après c’est cool d’avoir un univers fort. Pour le prochain single y’a quand même un univers très précis et on en a fait un clip d’animation avec pleins de personnages qui apparaissent dedans, y a une cosmogonie. 

Listen Up : Qui c’est qui fait le clip ?

Tino : Ben c’est nous, on a tout fait nous même.

Listen Up : Vous pouvez résumer le clip en un mot valise ?

Tristan : Métamorphose.

Listen Up : Vous avez des machines magiques qui façonnent un peu votre son ?

Tristan : On en utilise pas mal mais j’ai un combo top pour les démos et on jam souvent avec c’est l’OP-Z, un tout petit synthé on dirait une télécommande, avec lequel tu peux faire une démo complète, la batterie, les basses, les synthés… Et on couple avec un petit sampler qui s’appelle la Blackbox et avec ça tu ride à fond. On a fait toute nos démos avec ça.

Tino : La TB 303 aussi, c’est juste un classique qui fait danser. Et ya un nouveau pote qui arrive pour le prochain (EP), c’est le Poly D, refonte du minimoog.

 

INTERVIEW DRUIDIQUE

 

Listen Up : Qui est vôtre druide mentor ?

Tino : Faldorne pour moi. Druide et humain, elle coûte un feu, une forêt et une random. Il peut faire venir des loups, si je joue des cartes depuis l’exil.

Listen Up : Tristan, entre gargamel et panoramix ?

Tristan : Pano, il est beaucoup plus sympathique, Gargamel il fou la merde de ouf avec les esprits de la forêt, les schtroumpfs il les laisse jamais tranquille, pas cool.

Mais y’en a un dans Astérix dans l’épisode spécial druide qui change l’eau en vin, comme Jésus, mais je sais plus son nom.

Listen Up : Donc ton druide préféré c’est Jésus ? (rire)

Tino : Et voilà, en fait on fait du rock chrétien, les druides c’était un cover-up (rire).

Listen Up : C’est quoi le quotidien d’un druide ?

Tino : Nous on est que des apprentis… mais je pense, je parle au nom des druides, que déjà ça doit être une salutation aux éléments, au soleil et à la nature, aux arbres. Chaque druide a un arbre qui lui est attribué. Moi c’est le peuplier, Tristan c’est le sorbier. Donc idéalement tu vas aller voir ton arbre référent et tu peux aller lui parler, il va te comprendre et vice-versa.

Je pense que ça doit être ça un peu la morning routine. Après sinon se boire un gros café, se fumer une tige et puis passer la journée à écrire des chansons pour les bardes, pour les ovates aller cueillir des plantes médicinales et pour les druides, gérer la communauté, faire des travaux philosophiques,  essayer de transmettre le savoir.

Listen Up : Quel est votre rapport aux autres druides ?

Tino : On a pour objectif d’aller dans la forêt, on a été invités par une official druidesse en bretagne à aller visiter les petits coins à énergie dans la forêt.

Listen Up : C’est quoi votre animal totem ?

Tino : Moi c’est le chien teckel, le chien saucisse.

Tristan : Moi c’est le maki catta, un lémurien noir et blanc.

Listen Up : Vous avez déjà communiqué avec une biche ?

Tino : Alors très bonne question. J’ai déjà vu une biche mais communiqué avec elle, non. Elle était beaucoup trop loin.

Tristan : Très fuyante, c’est rapide une biche.

Tino : J’imagine que ça s’appelle comme ça (le festival) parce qu’il y en a pas mal.

Listen Up : Peut être parce qu’on est tous des biches au fond… Ce serait quoi pour vous le 5ème élément ?

Tristan : On avait mis l’humain au centre de tout ça quand même, du point de vue d’un humain, l’hyper-druide est ce 5ème élément, celui qui essaye de les comprendre et de graviter autour alors qu’il en est un peu éloigné des fois.

Listen Up : Peut-on dompter les éléments ou c’est eux qui nous domptent ?

Tristan : Ils nous domptent, mais c’est à toi de flexer avec . Apprendre à vivre avec les éléments, on l’oublie trop.

Listen Up : Comment on dit Walter Astral en druide ?

Tino : C’est comme les traductions à Toulouse en Occitan, c’est la même chose avec un petit accent gaélique.

Listen Up : Mais qui est vraiment Walter Astral… ?

Tristan : C’est un voyageur des multiverses qui vit dans celui des goblins, des gnomes, c’est sa zone à lui et puis par un passage un peu étonnant un matin il nous est apparu via un rêve qu’on a fait en commun.

Tino : On l’a pas revu depuis d’ailleurs…

Listen Up : Et il valide ?

Tino : Ha il valide je pense, sinon il serait revenu pour dire “wooh les gars, qu’est-ce que vous faites de mon nom”.

 

Entretien par : Mickaël Burlot, Élise Wojnarowski & Julien Montcouquiol