Dans la lignée de Fever en 2019, « Sand », nouvel opus des flamands de Courtrai, est sorti le 26 Février dernier.

Avec leur cinquième album Sand les Belges de Balthazar reviennent avec un disque difficile à classer. On pourrait opter pour la facilité et parler de pop alternative, terme fourre-tout qui ne veut pas dire grand chose, mais l’originalité de Balthazar réside surtout dans le caractère hétérogène de sa production et la faculté qu’ils ont à nous surprendre par des arrangements venus d’horizons bien différents.

Balthazar poursuit son épopée élégante en affirmant encore un peu plus la maîtrise d’une synthèse sonore chaude et sexy dans leurs productions, sans pour autant laisser de côté le groove délicieusement imparfait du musicien. Ainsi le « four on the floor » efficace des boites à rythme est mise en balance avec les percussions sautillantes et métissés qui parcourent le disque. Les arpeggiators, pads et brass cheesy du synthé dialoguent avec le saxophone, les guitares et les violons, dans un grand bal cosmopolite et harmonieux, ou analogique et acoustique dansent ensemble.

Si les deux membres fondateurs du groupe Maartin Devolder et Jinte Deprez se réclament en partie des Talking Heads, on y verra une filiation au moins dans cette ouverture d’esprit défricheuse vis à vis des arrangements.

On retrouve des tonalités jazz sur plusieurs compositions de l’album comme le You won’t come around, douce love song mélancolique évoquant un amour destructeur (thème qui reviens sur plusieurs titres du disque).

La chanson s’ouvre avec une boîte à rythme vintage, ce genre de b-a-r que les musiciens utilisait seulement pour s’accompagner lorsqu’il s’entrainait seul (avec des pattern préconçu type “bossa”, “jazz”, “rock”), puis arrivent des arpèges de guitares rappelant l’univers hallucinogène rêveur du groupe Crumb. Dans la deuxième partie du titre viens ensuite une longue complainte aérée et éraillée ou le chanteur répète un “I’m in love” lancinant évoquant le cool d’un Mac de Marco. Le titre se termine par de douces et enveloppantes nappes de violons doublées d’un synthé qui vont ralentir progressivement comme un vinyle qu’on vient d’éteindre et qui tourne encore légèrement entrainé par le mouvement mécanique qui l’a précédé.

Il est encore question d’amours brisés sur Leaving Antwerp, titre groovy au synthé chaud et minimaliste et à la ligne de basse bien charnu.

Les choeurs haut perchés et plongés dans une large réverbe (“Ahhh Sylvie girl, we gotta keep on movin’”) nous rappellent, comme sur le non moins groovy Hourglass, les cousins anglais du groupe Jungle. La mélodie légèrement out of pitch du synthé accompagnant la voix sur le refrain provoque une sensation de bien être simple et sans artifice, comme une légère brise sur la peau, au soleil, lorsqu’à cet instant tout va bien.

On retrouve également ces réfèrences au jazz sur le Powerless qui clôture l’album, avec son piano droit légèrement désaccordé.


Dans cet émouvant dernier titre, aux choeurs rageurs du “Power” succède le “Less” du chanteur, dans un murmure flegmatique et alangui comme sur de nombreux titre de l’album ou les couplets suaves et sombres vous sont murmuré à l’oreille et les refrains en choeurs, plus aigus, vous ramène à la lumière soul de la motown (toute proportion gardée).

Sur le titre I want you, Balthazar nous livre une pop song 80’s hypnotique et entrainante qui rappelle furieusement le Manheater de Darryl and Oates, ainsi que certains titre de Depeche Mode ou Phil Collins. La touche Balthazar réside peut être dans ces saxophones presque gipsy, ces cuivres acoustiques qui transforment l’esthétique coldwave US du morceau en un folklore européen populaire.

On pourrait citer également Linger On, et son refrain imparable, notamment grâce au rythme du synthé percussif et aux arpeggiators qui l’accompagnent. Dans cette déclaration enflammée, le chanteur s’attarde et tourne autour de la femme aimé attendant le moindre signe d’affection de sa part.

L’album Sand des musiciens de Courtrai est peut être le plus produit et ambitieux du groupe qui semble se servir de son background de musiciens rock pour explorer des territoires de plus en plus audacieux. Malgré une dichotomie peut être un peu répétitive entre voix ténébreuse du couplet et choeurs soulful du refrain et des constructions de morceaux assez similaires, Balthazar n’en livre pas moins un excellent album qui allie la qualité du songwriting avec l’élégance et la recherche de sa production sonore.

 

 

Julien Montcouquiol.