On a eu l’occasion de rencontrer MAWIMBI lors des  Transmusicales 2015. Interview sur le label, le collectif et leur tout premier live!

À la base vous étiez un collectif qui est aussi devenu un label. Comment vous revendiquez-vous le plus ?

Alex : A la base on est un groupe de potes qui veut défendre une certaine idée de la musique. On a commencé par un collectif de DJ qui organise des soirées et qui défend à travers les DJ sets ? Chaque artiste qu’on invite a une lecture différente de cette idée là un peu afrocentrée et de créateur avec la musique électronique. Et puis ensuite il y a des artistes qu’on aurait voulu faire venir en soirée mais qui viennent de trop loin, du bout du monde sans avoir toujours l’argent pour amener autant de gens comme ça. Alors on s’est demandé comment continuer à défendre leur musique aussi ? En vendant leurs disques, en faisant un label. Donc c’était quelque chose d’assez évident, comme une continuité logique de démarche pour défendre et promouvoir notre vision de la musique. Et là on vient de faire notre premier live pour les Transmusicales.

Adrien : On est passionnés de musique et en musique électronique les identités marchent beaucoup par label. Chaque label a son identité sonore bien particulière et nous on avait à cœur de développer la notre. Le vinyle qu’on a sorti en avril en a été un premier aboutissement.

 

Comment s’est passée l’intégration de Umeme Afrorave dans votre label ?

Adrien : En fait en juillet 2014 on a invité Awanto 3, qui fait partie des Rush Hour. Les Pays Bas c’est un petit pays et à Amsterdam notamment, tous les musiciens se connaissent. Ils nous a dit « ah bah voilà, moi j’ai ce pote là, il a démarré un nouveau projet et vous me dites que vous vous faites de l’afro-électro, je pense que ça pourrait correspondre et vous intéresser ». Mais comme on n’avait pas commencé notre activité de label on s’est demandé si on aurait les épaules pour le faire. Et puis de fil en aiguille, on les a rencontré sur skype, par e-mail, etc. Puis ils sont venus jouer une première fois en avril 2015 en France, ça s’est mis en place, on les a vu plusieurs fois et ils sont devenus de bons copains. Maintenant on bosse sur des morceaux ensemble. C’est une dynamique de collaboration de long terme qu’on a mis en place avec eux mais encore une fois parce que ce sont devenus des amis.

Le label permet de toucher des artistes plus loin. Le collectif originel lui, a-t-il vocation à s’élargir ? C’est quoi le plan ?

Adrien : À Paris on n’a jamais eu l’occasion de rencontrer quelqu’un dont on se disait qu’il pourrait rejoindre le collectif. Maintenant avec quelqu’un comme Daniele qui est le leader de Umeme et qui partage et a vraiment envie d’avancer dans le même sens que nous esthétiquement et poly-instrumentiste entrainé qui a plus d’expérience que nous, ça pourrait s’envisager. Peut-être qu’on a besoin de ça aussi pour avancer musicalement. Donc oui je pense qu’à terme Mawimbi, sur le plan de la création en tout cas ça pourrait devenir un collectif plus large. Mais on le fait de manière organique, sans forcer, au fil des rencontres.

Alex : Concrètement on n’est pas un label dans le sens où toute personne qui fait un morceau sur notre label va devoir sortir des trucs tout le temps chez nous pendant des mois. On est plutôt sur un modèle comme Sound Pellegrino ; on essaie de faire découvrir des artistes, de leur donner une exposition et si ces gens là veulent encore bosser avec nous après et qu’il y a des liens et des affinités plus fortes qui se créent, tant mieux mais si ça leur permet d’aller ailleurs sur de plus gros labels et d’avoir plus d’exposition, tant mieux aussi. On restera en contact et on les remixera peut-être aussi mais en tout cas le but n’est pas d’être une espèce de label constitué.

Adrien : On fonctionne beaucoup comme ça de toute façon. C’est à dire que le label pour nous c’est deux choses : d’une part on promeut des artistes qui n’ont pas de public, c’est principalement ce qu’on a fait jusqu’ici. Et d’autre part, nous on est des passionnés de musiques afro et de musiques noire au sens large mais on sait qu’on n’est pas les seuls. L’idée est donc aussi de proposer à quelqu’un dont on sent qu’il a une sensibilité similaire de faire un EP chez nous, qui soit plus dans cette veine là. On a vraiment une identité et quand quelqu’un signe chez nous il faut rester dans cette identité là, pour garder l’esthétique particulière au label mais comme dans Border community avec James Holden ou Text Records avec Four tet.

 

Comment avez-vous travaillé pour préparer votre live ?

Adrien : On a scindé les choses en deux parties. Au milieu il y avait une partie DJ set dont Alex et Bertrand se sont chargés. Ils ont préparé des morceaux spéciaux juste pour le live, des mash-up : ils ont travaillé quelque chose de vraiment très original, quasiment inédit en fait. Et pour le live c’est Lucas, Clément et moi qui nous en sommes chargés. On a mis en commun la matière brute qu’on avait, à savoir nos morceaux et on s’est demandés comment on pouvait en faire quelque chose de cohérent ? quel agencement, par quoi on commence ? et puis surtout comme faire en sorte que ce soit un vrai live, c’est à dire comment modifier la matière musicale en direct. On s’est équipés en matériel etc.

 

Est-ce que vous avez une base de donnée de sons comme Den Sorte Skole qui prend des milliers de samples, vous avez un abonnement à la médiathèque et une bonne connexion ou vous avez voyagé pour faire des captations ?

Adrien : C’est internet, écouter écouter écouter de la musique et parfois une phrase musicale parle plus que l’autre, on se dit « ah j’ai envie de faire autre chose avec ». On n’a pas voyagé pour avoir des enregistrements.

 

Et ça vous donne envie de le faire ?

– Ça dépend. Si tu parles de musiques traditionnelles et des enregistrements qui ont un caractère plus ethnomusicologique, ces choses là existent depuis des dizaines et des dizaines d’années. D’ailleurs, l’ORTF, avait un label affilié, Ocora, qui avait énormément d’enregistrements en Afrique et dans d’autres régions du monde mais ça c’est une pratique scientifique. Une captation de feed recording, c’est un travail d’ethnomusicologue pour savoir ce qu’on capte, pourquoi, qu’est-ce que ça veut dire. Il faut être précautionneux avec ce genre de pratiques. Évidemment on a envie de voyager mais pour enregistrer des musiciens locaux qui sont déjà dans une démarche de musiciens. C’est pas aller dans une tribu de pygmées pour leur demander de faire leur rituel. Je préfère préciser parce que ce genre de cliché arrive vite.

 

Donc toi quand vous travaillez les sons et que vous utilisez des samples de musique traditionnelle vous vous posez ces questions là ?

– On fait extrêmement attention. Moi par exemple dans la première partie du live c’est surtout des morceaux que j’avais travaillé de mon côté et qu’on a retravaillé ensemble et les samples que j’ai choisi ce sont des extraits de musique malienne qui existent déjà et que j’ai essayé de réarranger avec des éléments électroniques donc avec un rythme, un synthétiseur.. donc oui. Parce qu’on ne veut pas être le collectif qui prend juste la boucle de percussions parce que ça groove et que ça fait un peu tribal machin, tu vois ce que je veux dire, il faut être respectueux des traditions. En revanche quand parfois tu fais complètement oublier l’origine du sample, là c’est génial ! mais il faut être bon pour ça.

 

Mawimbi ça signifie « l’onde », est-ce que ce masque représente la divinité ondulatoire ?

Adrien : Ouais carrément ! On n’avait jamais vu les choses comme ça mais oui ! En fait on a eu d’autres traductions par des gens qui parlent swahili et apparemment il y a deux autres traductions possibles c’est « vague » et « tempête ». Ce qui nous va très bien aussi parce que deux d’entre nous on grandi au bord de la mer et ils sont bien iodés. Et la tempête c’est quand on monte sur scène, c’est un peu ça.

 

Et pour votre live est-ce que vous avez dans l’idée de le retravailler ? Il y avait un percussionniste et un bassiste (Adrien), est-ce que vous ferez venir d’autres musiciens ?

Adrien : Le live c’était vraiment une première et il va évoluer au fur et à mesure de nos nouveaux morceaux. La présence des musiciens se travaille, là c’était un peu un essai. Mais évidemment plus on peut mettre de vrais musiciens avec de vrais instruments sur scène, mieux c’est. Mais il faut leur trouver de la place et en musique électronique c’est pas toujours évident.

MAWIMBI

Durant votre live, des images étaient projetées : comment vous les choisissez ?

Adrien : Alors pour ça on va faire un gros big-up au collectif Minderz qui pendant qu’on jouait en live faisait du vjing depuis la régie. Ils étaient en live autant que nous. C’est eux qui ont conçu la structure, choisi toutes les images et fait l’animation : un boulot monstrueux. Ils ont fait la résidence et passé une semaine avec nous ce qui a nécessité beaucoup de travail en amont.

Alex : On leur envoyait tous les morceaux quand on préparait. Ils construisaient les images exactement en fonction des morceaux.

 

Vous pouvez nous raconter une anecdote de cette résidence ?

Tous : Oulah !!

Lucas : Le jacuzzi était un moment très inspirant pour nous. Notamment pour moi, pour Bertrand et pour Clément. Ambiance rouge, tamisée, un moment de complicité et de plaisir.

Clément : Ambiance verte aussi mais ça c’était pour le reste de la journée. Très vegan, très écolo. C’était bio quoi !

Lucas : Aussi, la Sirène de la Rochelle a le meilleur catering de France ! Big up Laulau !

 

Recueilli par Bonnal et Mickaël