Orchestre et musique électronique semblent faire bon ménage tant les ponts entre les deux sont de plus en plus fréquents. L’exemple de Jeff Mills (récemment décoré chevalier des Arts et des Lettres) en est un des plus probants, mais aujourd’hui c’est son compère de Detroit, Carl Craig, qui est sur le devant de la scène avec son album Versus sorti sur le label Infiné.
Né en 2008 à La Cité de la Musique sous l’impulsion du pianiste Luxembourgeois Francesco Tristano (ancien membre du groupe Aufgang), Versus est une adaptation des œuvres phares de Carl Craig avec l’orchestre Les Siècles dirigé par François-Xavier Roth. Pour la version studio de Versus, Carl Craig est à la composition et Francesco Tristano aux arrangements.
Si les morceaux présents sur l’album ne constituent pas une rupture radicale avec les titres originaux, la puissance des cuivres, la volupté des cordes mêlées aux envolées du piano leur confèrent sans nul doute un relief exceptionnel et une toute nouvelle lecture. Une bonne illustration est certainement Sandstorms dont la poésie originale est magnifiée par l’orchestration symphonique qui lui donne plus de corps mais aussi plus de rudesse. De même pour Desire dont on se demande comment une version électro-acoustique n’avait pas vu le jour plus tôt, tant elle est envoutante et la mélancolie qui s’en dégage est hypnotique.
Disséminés ça-et-là, On trouve sur ce disque 5 morceaux de transition (Enter the Darkness, Coding Sequence, You’re Our Best and Only Friend, C-Beams Glitter et Coding Cycle dans l’ordre d’apparition) qui font office respectivement d’intro, d’interludes et d’outro. Leur construction plus ou moins similaire est faite de la répétition d’un thème simple qui guide l’auditeur dans le chemin tracé par cet opus.
Petites perles de cet album, l’inversion des rôles (composition et arrangements) de Tristano et Craig sur deux titres. Le premier, Barcelona Trist, donne, comme l’on pouvait s’en douter une place centrale au piano et laisse de côté les basses franches de la techno pour des distorsions plus en accord avec le thème. Le second, The Melody, composé avec Rami Khalifé (son ancien compère de Aufgang et frère ainé de Bachar Mar-Khalifé) rappelle évidemment Aufgang. En effet, si la rythmique a toujours une place importante, la construction se focalise plus sur des variations pour donner naissance à une pièce où électronique et acoustique se répondent dans un grand ballet sonore.
Léger bémol de Versus, Carl Craig et Francesco auraient pu plus appuyer sur la partie symphonique, pour bien spécifier le contraste avec les versions initiales. Résultat ? Parfois, les changements ne sont pas notables comme c’est le cas avec At Les.
Si vous avez connu les musiques de Carl Craig sur le dancefloor, Versus est une très belle façon de les faire entrer dans votre salon ou dans votre casque.
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