2022, c’est terminé, la rédaction de Listen Up vous fait ses coups de coeur de l’année. Découvrez les meilleurs albums et les meilleurs concerts de Maxime !

Albums de l’année: 

l’Album le plus explosif: black midi – « Hellfire »

Le trio britannique black midi est revenu en 2022 avec Hellfire, leur troisième album, un an seulement après le déroutant Cavalcade. Cette fois-ci, Geordie Greep, Cameron Picton et Morgan Simpson nous emmènent dans les tréfonds de l’humanité avec une série d’histoires et de personnages qui font de Hellfire un véritable cirque infernal. Côté musique, le groupe est plus incisif et technique que jamais, avec certaines de leurs chansons les plus frénétiques (« Sugar/Tzu », »Welcome to Hell », « The Race is About to Begin ») mais aussi des moments plus suaves et délicats (« Still », « Dangerous Liaisons », « The Defence »). Avec Hellfire et une production magnifiée par Marta Salogni, black midi démontre qu’il fait parti des groupes les plus intéressants de cette génération et est là pour rester.

l’Album le plus parfait: Big Thief – « Dragon New Warm Mountain I Believe in You »

Adrianne Lenker et co. n’y sont pas allé.es à moitié sur ce nouveau disque, avec un titre à rallonge inspiré de son dernier album solo, mais aussi avec 20 pistes s’étalant sur près de 1h20 de musique. Enregistré dans 4 endroits différents avec des ingénieurs différents (sur une idée du batteur James Krivchnena), l’album se veut être un collage de tout ce qui fait la force des compositions de Lenker et de Big Thief, résultant logiquement en des chansons qui sonnent très différemment les unes des autres. Si tous ces éléments ne vous ont toujours pas rebuté, tant mieux ; parce que ce que recèle ce disque n’est plus ni moins qu’un des enregistrements les plus impressionnants de ces dernières années: des chansons magiques (toutes!) avec une Adrianne Lenker au sommet de son art. Juste merveilleux.

l’Album le plus entêtant: Alvvays – « Blue Rev »

Si un groupe devait symboliser la mélodie qui vous reste coincée toute la journée, c’est bien Alvvays. Généralement, on est soit très agacé de ne pas pouvoir s’en séparer, soit obsédé par une chanson au point d’avoir envie de la chanter en hurlant partout. Pour Alvvays, c’est plutôt le deuxième cas. Déjà distingué par un album précédent (Antisocialites en 2017), le groupe de Molly Rankin est enfin de retour avec « Blue Rev », une ode nostalgique aux jeunes années du groupe en Ontario. Mais le disque ne tombe jamais dans le mélodrame niais, au contraire. Attendez-vous plutôt à des chansons énergiques et puissantes sur fond de shoegaze très pop (et oui ça fonctionne dans ce cas précis). Le genre d’album qui est une véritable friandise, qu’on a immédiatement envie de remettre une fois terminé. C’est trop bien, voilà!

l’Album le plus intense: billy woods – Aethiopes

L’une des figures les plus actives et intéressantes du rap underground de New York revient cette année avec deux albums (!), Aethiopes et Church. Si le second est très bon, c’est surtout sur ce premier disque, Aethiopes, que billy woods démontre pourquoi il est devenu une force incontournable de ce qui se fait de mieux en rap exploratoire, expérimental et incisif. Avec une ambiance qui vous attrapera à la gorge dès les premières secondes, billy woods nous emmène dans son univers sombre et envoutant, avec toujours une attention forte sur la musicalité en plus des textes, portant sur ce disque largement autour de la question de l’esclavagise, du (néo)colonialisme et de la vie en tant qu’africain-américain aujourd’hui. Il prouve à nouveau qu’il est dans le haut du panier pour qui cherche à vraiment se plonger dans une oeuvre dense, lyrique et passionné. Un incontournable pour les amateur.ices de hip hop aventureux.

L’album le plus doux: Silvana Estrada – Marchita

Voici un premier album qui impose directement Silvana Estrada comme une songwriter de très haut niveau. Venant du Mexique, Estrada est autant inspirée des chanteur.ses classiques de folk sud-américaine que de musiciens jazz internationaux. Derrière une fausse simplicité, Marchita regorge de chansons toutes plus subtilement composées les unes que les autres, le tout saupoudré de la voix sautillante et si juste de Estrada qui malgré l’apparente douceur des chansons impose une intensité qui ne lâchera pas l’auditeur.ice du début à la fin du disque. Dans le sillage d’autres artistes comme Natalia Lafourcade, Silvana Estrada impressionne par ce premier disque d’une grande beauté.

Autres artistes à mentionner dont les albums m’ont vraiment marqué cette année: Daniel Rossen ; Black Country, New Road ; Makaya McCraven ; caroline ; Sélène Saint-Aimé ; Nilüfer Yanya ; OSEES ; Cécile McLorin Salvant ; Natalia Lafourcade ; Yard Act ; Charlotte Adigéry et Bolis Pupul ; Pusha T ; Rosalia ; Uwalmassa ; Viagra Boys ; Jockstrap ; Working Men’s Club ; Sessa ; Weyes Blood ; Sudan Archives ; They Hate Change ; Soul Glo ; Ashenspire ; OFF! ; Tim Bernardes ; King Hannah ; Kali Malone… Viagra Bots

Concerts de l’année:

Rien Virgule – La Station (5 mars)

Groupe expérimental français ayant perdu l’un de ses membres peu avant la sortie de cet album, Rien Virgule était revenu en 2021 avec « la Consolation des violettes », album aussi envoutant que mystérieux et intéressant. Le groupe allait-il tenir le coup en contexte live? Avec ce concert, la Station d’Aubervilliers s’est transformée en transe géante, complètement transportée par les grooves du groupe (quel batteur), les effets analogiques et la voix parfois fantomatique de Anne Careil. C’était le genre de concert où on ne se souvient plus du début et où ne voit pas la fin venir, un moment vraiment hors du temps.

Gruff Rhys – Le Hasard Ludique (23 mars)

C’est un peu au dernier moment qu’on atterrit à ce concert de Gruff Rhys, gallois figure du pop rock accessible mais aussi excentrique (Super Furry Animals). En arrivant sur scène avec son groupe, Gruff brandit plusieurs pancartes qui disent que ce concert va peut-être changer notre vie, ou peut-être pas. Il réutilisera plusieurs fois par ailleurs ses pancartes (« Ape shit », « Applause! ») dans un concert qui restera comme l’un des plus drôles auquel on a assisté, avec Gruff mais aussi les autres membres du groupe s’adonnant à des blagues vraiment bien senties et une interaction avec la public comme on a rarement connu, très bienveillante et pleine de connivence. Du côté de la setlist, le groupe a joué 23 chansons (!) pour un concert de près de 2h, enchainant les titres plus catchy les uns que les autres. On est ressorti de ce concert avec un grand sourire et un souvenir impérissable.

Jenny Hval – La Gaîté Lyrique (13 avril)

Le concert de Jenny Hval le 13 avril aura été sans aucun doute l’un des plus marquants auxquels j’ai pu assister cette année, du genre à rester longtemps dans les mémoires. Hval et son groupe ont envouté la salle pendant un set si beau, juste et aventureux, tout en étant accessible et groovy. Pas grand chose d’autre à dire en plus de mon live report toujours à lire ICI.

Low – Alhambra (2 mai)

Pour cette date parisienne, Low choisissait l’Alhambra, salle traditionnellement associée au théâtre, pour promouvoir leur incroyable dernier album « HEY WHAT » sorti en 2021. Après une première partie assurée par les excellentes Divide and Dissolve qui ont fait monter le volume dans la salle, Low arrive sur scène en trio. Alan Sparhawk et Mimi Parker sont accompagné.es d’une bassiste pour cette tournée, ainsi qu’une scénographie sobre mais efficace avec plusieurs écrans projetant des imageries abstraites ainsi qu’une ambiance très sobre et sombre, laissant véritablement la salle dans une quasi pénombre. M’attendant plutôt à un concert assez explosif, le groupe joue en fait plutôt sur le côté doux et sensible de leurs compositions, donnant vraiment une autre dimension à leur musique. Après avoir joué la quasi intégralité du dernier disque, Low joue beaucoup d’anciens morceaux de toute leur discographie avec au final 22 titres joué et environ 2h de musique. Le décès tragique de Mimi Parker en novembre 2022 rend le souvenir de ce concert encore plus poignant et intense.

Viagra Boys – l’Elysée Montmartre (5 mai)

Tout simplement le meilleur concert « rock » auquel j’ai pu assister cette année. En arrivant sur scène, les Viagra Boys joue les premiers roulements de basse de « Research Chemicals » alors que Sebastian Murphy enlève son t-shirt pour laisser apparaître son bide gonflé à la bière, et c’est tout l’Elysée Montmartre qui s’embrase. Il y a des concerts où on a du mal à rentrer dans l’atmosphère du groupe avant quelques chansons. Ici c’est tout l’inverse: on rentre tout de suite dans l’univers à la fois ironique au possible, drôle, souvent incisif et toujours absurde des Viagra Boys. Avec le rappel, le groupe revient avec une version de « Sports » qui fera trembler toute la salle. Une véritable claque qui consolide comme l’un des meilleurs groupes à voir en concert du moment.

black midi – Primavera Sound Barcelone (2 juin)

En ce premier jour de Primavera Sound, la ribambelle de groupes à la programmation faisait tourner la tête, mais c’est bien black midi que j’attendais impatiemment, tant le groupe est imprévisible et passionnant à voir en live. La musique d’entrée sur scène (« SAOKO » de Rosalia) retentit juste après la désormais traditionnelle voix d’annonceur sportif qui décrit black midi plutôt comme des boxeurs entrant sur un ring qu’un groupe de rock. Le groupe en quintet (avec clavier et saxophone en plus du trio normal) arrive et le set démarre à toute vitesse avec un « 953 », « Speedway » et « Welcome to Hell ». Les 30 premiers mètres en face de la scène se transforment en mosh pit géant tandis que le groupe joue de manière frénétique des compositions déjà intenses en version studio, mais qui prennent vraiment une dimension de rêve fiévreux en concert. Le groupe est à la fois précis, intense et en même temps dégage une forme de folie contagieuse. Toujours quelque chose de marquant à voir en concert, ce live précis reste malgré tout l’un des meilleurs que j’ai vu et probablement le concert le plus mémorable que j’ai vu cette année.

Mogwai – Primavera Sound Barcelone (3 juin)

Alors que le fameux festival de Barcelone venait d’annoncer malheureusement l’annulation du concert d’une des têtes d’affiche, Mogwai ont été annoncé en remplacement au dernier moment. Ceci avait de quoi me réjouir, car un concert de Mogwai est toujours quelque chose de puissant et réconfortant à voir, tant ce groupe a accompagné ma vie depuis maintenant pas mal de temps. Le groupe est introduit sur scène par Bob Nastanovich de Pavement qui explique avoir appelé Mogwai quelques jours auparvant et les avoir convaincu de venir jouer à la dernière minute au Primavera à Barcelone… Arrivant sur scène, le batteur Martin Bulloch arbore justement un t-shirt des Strokes en clin d’oeil. Ce qu’on peut dire, c’est que Mogwai régalera l’audience avec une setlist avec beaucoup de fan favorites (« White Noise », « How to Be a Werewolf », « Hunted by a Freak » et bien sûr « Mogwai Fear Satan ») mais aussi des morceaux de leur plus récent album, As The Love Continues. Un concert qui a démarré à 2h30 du matin, et qui a permis de transformer la nuit estivale de Barcelone en véritable tourbillon de sons.

Fontaines D.C. – Route du Rock à Saint-Malo (20 août)

Fontaines D.C est connu pour être un groupe qui divise souvent, notamment ses prestations live. Parfois c’est raté et la sauce ne prend pas, parfois les planètes s’alignent et on comprend mieux le succès de ce groupe qui pourtant émerge d’une scène bouillonnante où beaucoup de groupes ont un son similaire. Ce qui fait la force de Fontaines, c’est le mélange entre un son post-punk épuré et assez brut (notamment les vocaux de Grian Chatten qui peuvent choquer au début) et les instrumentales plutôt planantes et étrangement réconfortantes du groupe. Cette tendance a été accentué par leur dernier album, Skinty Fia, qui lorgne encore plus vers ce son assez mélo. Mais ce soir à la Route du Rock de Saint-Malo, le groupe semble être venu avec l’intention de marquer les esprits. Le son est vraiment massif et juste, chaque instrument occupant l’espace avec précision, et la voix de Grian transperçant la nuit (slot horaire de tête d’affiche oblige). Le groupe semble avoir vraiment changé de dimension, et on ne peut plus douter de leur capacité à assumer ce rôle de tête d’affiche. De la prestation musicale aux lumières particulièrement percutantes pendant ce concert, le groupe nous offre un concert « best of » avec 17 morceaux, avec un final sur « Boys in the Better Land » et « I love you » très marquant.

Godspeed You! Black Emperor – l’Elysée Montmartre (25 septembre)

Véritables légendes du post-rock, genre malheureusement délaissé qui a connu ses heures de gloire au début du siècle, GY!BE gardent malgré tout une discographie qui reste passionnante et surtout des concerts qui méritent leur réputation. Après un report, le concert du groupe peut enfin se tenir en cette rentrée 2022 dans la très belle salle de l’Elysée Montmartre qui affiche complet. Le groupe ne réinvente pas vraiment ce qu’il la rendu si unique en premier lieu et garde sa modestie de scénographie: le groupe est assis – pour la plupart – et très peu éclairé, quasi uniquement par les vidéos qui passent sur l’écran géant derrière eux, où passeront notamment des images de révolte et de violences policières collant particulièrement bien avec l’ambiance apocalyptique et épique créée par le groupe. Sur un « Sad Mafioso » absolument monstrueux pour finir, le groupe s’éclipse en remerciant discrètement les auditeur.ces, encore sous le choc. Il faut vraiment le voir pour le croire!

Myriam Gendron – Petit Bain (6 novembre)

Parfois le plus simple est le mieux, et Myriam Gendron illustre exactement cela avec ce concert très attendu puisque rare. L’artiste folk devait premièrement jouer dans un bar parisien, mais devant l’affluence et la demande, le concert a été déplacé au Petit Bain pour permettre au plus grand nombre d’y assister. Après une première partie de Mary Lattimore à la harpe, Myriam Gendron monte sur scène seule avec une guitare sèche et une guitare électrique seulement. La musicienne québécoise enchaine alors la plupart des chansons de son récent album Ma Délire avec aussi quelques compositions plus anciennes et reprises. La salle écoute sans le silence de ce dimanche soir et tout le monde se régale de la beauté simple de ce concert qui est vraiment intimiste. Juste guitare et voix, Myriam Gendron semble être émue par l’accueil qui lui est réservé, à la hauteur de son talent.

Autres concerts mémorables: Irreversible Entanglements (Théâtre Jean-Vilar à Ivry, 11 février) ; Sélène Saint-Aimé (New Morning, 29 mars) ; Thundercat (Elysée Montmartre, 6 avril) ; Daniel Rossen (Café de la Danse, 14 mai) ; Black Country, New Road (Primavera Sound Barcelone, 4 juin) ; King Gizzard and the Lizard Wizard (Sala Apolo Barcelone, 5 juin) ; Hailu Mergia (La Textil Barcelone, 7 juin) ; Angel Bat Dawid and tha Brothahood (Bourse du commerce, 13 juin) ; OSEES (Trianon, 29 juin) ; Spill Gold (La Station, 9 juillet) ; Follakzoid (La Station, 10 juillet) ; Cécile McLorin Salvant (Parc Floral, 21 juillet) ; Yard Act (Route du Rock, 18 août) ; Fat White Family (Route du Rock, 20 août) ; Stereolab (Gaîté Lyrique, 26 octobre) ; Sudan Archives (Café de la Danse, 18 novembre) ; Vlure (Supersonic, 19 novembre) ; Astéréotypie (Transmusicales, 8 décembre) ; Dalle Béton (Transmusicales, 9 décembre) ; Rosalia (Accor Arena, 18 décembre).