La saison des tops de fin d’année est déjà loin derrière nous, celle des tops de l’année à venir est presque terminée, quant aux tops des dernières décennies, laissons-les aux médias papier qui n’ont plus qu’un héritage musical à fêter, faute de rebond des ventes.

Je me réveille donc pour vous parler de rap, et des truc assimilables que je ne saurais vraiment catégoriser tant le terme de « rnb » évoque mieux les chanteuses à vocalises du rap français circa 2002 que les sorties aux influences 80′ qu’on entend en ce moment. Plus particulièrement, on va parler des artistes à suivre, de ce que va être le rap en 2016.

Si vous fréquentez assidûment les sites consacrés à ces musiques bruyantes qui font la France Racaille selon Valeurs Actuelles vous aurez sûrement déjà croisé certains de ces artistes qui feront l’année et deviendront les prochains Young Thug (ou qui plongeront dans la came après leurs premiers succès puis, quelques tweets pas vérifiés par leur attaché de presse plus tard, se transformeront en nouveaux Azealia Banks). De toute manière, à repousser sans cesse l’écriture de cet article, il ne passe pas une semaine sans que sorte un article sur un artiste de cette liste, sur des médias spécialisés  ou, bien pire, sur les Inrocks. De manière parfaitement arbitraire, j’ai décidé de commencer par les francophones.

HAMZA

Flow chantonné, vulgarité et violence des propos assumée, Hamza est un aimant à haters dans un rap francophone rempli de puristes. Ça ne l’empêchera sûrement pas d’imposer ses histoires de gangster, qui contrastent avec son rap très mélodique, comme une référence. Quand Kaaris détaille les tourments que connaîtront ses ennemis, ça n’étonne personne. Quand le jeune thug de Bruxelles le fait avec une petite voix autotunée, en fredonnant, on est dans l’innovation radicale.

 

JORRDEE ET LE 667

Ça a pas mal parlé de Jorrdee ces derniers temps. Certaines de ses sorties codéinées augurent un cloud rap français plus proche de la version originale américaine, par les thématiques abordées, que les récits aux préoccupations très ter-ter de PNL et autres DTF ou MMZ. Jorrdee a le potentiel pour devenir un rappeur pour branchés, mais fort heureusement, il aborde sa promotion de manière complètement chaotique (comprendre : il n’en a rien à battre), supprime régulièrement des sons postés trois mois plus tôt, et n’a pas l’air d’avoir un plan de carrière à plus de 48 heures. Cependant il n’est pas impensable de le voir sortir de nulle part un très bon projet en 2016 (cote : 6,66)

Autour de Jorrdee, au gré de divers projets foutraques, changeant de blaze tous les ans, on trouve les rappeurs du 667 (Osirus Jack, Freeze Corleone, Norsacce Berlusconi, Kix Kaki…), qui ont sorti un des projets que j’ai le plus écouté l’an dernier. Leur prodigalité (ils sortent pas mal de vieilles pistes traînant dans leurs disques durs, de remixes) et leur instabilité patronymique les rendent difficile à suivre. Leur musique, qui doit évidemment beaucoup aux opiacés en vente libre et à la scène underground de Memphis (dont le fer de lance était la Triple 6 Mafia), se rapproche parfois du rap lent, aquatique et malsain, démoniaque, du duo louisianais $uicideboy$. Les membres du 667 ont pour point commun de mélanger références ésotériques, phrasés d’Atlanta et instrus sombres pour en faire une mixture unique en France, une nouvelle drogue de synthèse aux effets secondaires inconnus. Suivez-les sur soundcloud, ils partagent et repostent en continu.

 

PNL

Arrivés comme des météores dans le rap français, les deux frères de Bebeil sortent un deuxième album en 2016. Surveillez-leur Twitter, les nouveaux clips ne devraient plus tarder à tomber.

 

JEANJASS & CABALLERO

Bien que leur équipe de foot ait un maillot noir et blanc très classe, comme la Juventus ou encore l’Angers SCO, Charleroi est la pire ville du monde. Pour compenser cette terrible réputation, faite de désindustrialisation et d’alcoolisme, JeanJass fait du très bon rap.

 

JAZZY BAZZ

Okay le mec n’est pas un nouveau, mais son album vous l’avez écouté ? Jazzy Bazz est le type le plus respectable du rap français et, avec P-Town, il arrive à plus représenter Paris que le J’représente Paris d’Emotion Lafolie. Deuxième raison : il sait faire oeuvre de charité, puisqu’il vient de poser sur un morceau aux côtés de Brav et Kamnouze (avec qui je partage le double-stigmate d’avoir vécu à Cholet et de rapper très mal). On retrouve aussi l’excellent Nakk Mendoza sur ce morceau dont je ne vous laisserai pas le lien.

 

PANAMA BENDE & LES TONTONS FLINGUEURS

Ces deux collectifs originaires de Paris et sa petite couronne auront du mal à éviter les comparaisons avec l’Entourage. Selon mes observations à la scientificité aléatoire, ils ont environ cinq ans de moins que leurs ‘grands-frères’, et leurs références rap commencent aux premiers albums solo de Booba plutôt qu’avec les X-Men. À part ça ils sont jeunes, techniques, adorent les allitérations, et s’aventurent parfois sur des productions plus actuelles que leurs prédécesseurs. En 2016, ils n’auront rien à perdre, tout à gagner. Pour mettre également à l’honneur LTF, ressortons ce clip de 2014 en attendant leur prochain projet : Le Démon À 9 Queues Volume II.

 

MHD

Pour des raisons qui me dépassent, j’ai failli oublier MHD dans cette énumération des figures montantes du rap francophone. Comprenant que sa trap était trop banale pour lui permettre de percer un jour, le MC du XIXème arrondissement a décidé de balayer ses instrus habituelles pour les remplacer par des sons afro-house. Ce n’est pas totalement nouveau à l’échelle mondiale -le rap sud-africain est en grande partie constitué de sons très electro, basés sur les genres locaux comme le kwaito ou le gqom-, mais en France où le rap est très codifié, c’est tout à fait surprenant, et le public est au rendez-vous. Avec sa série de clips « Afro Trap », MHD a accumulé les millions de vues et, au vu des commentaires, commencé à faire danser en-dehors des frontières hexagonales. Bien que la formule semble s’essouffler (il en est au sixième épisode), il faudra désormais compter avec MHD et tous les héritiers qu’il va nécessairement inspirer.

 

JUL

Désolé, mais JUL va continuer à rouler, T-Max en Y, sur le rap cette année. Vous êtes sûr de ne pas avoir aimé « Dans l’appart » ?

 

Je ne rallonge pas beaucoup plus la liste, mais j’aimerais aussi vraiment voir Di-Meh devenir grand public en 2016. Ce sera sûrement le cas pour Ash Kidd, même si ses sons m’énervent. Pour finir, je rajoute le poète maudit Hyacinthe : à force de l’écouter, j’avais oublié qu’il reste assez confidentiel.