À l’occasion du Mama Festival nous avons pu nous entretenir avec Julia Vroegh, bassiste du groupe Tramhaus. Cette bande de néerlandais brille avant tout par ses concerts légendaires aux sonorités post-punk. À une époque où la consommation musicale passe avant tout par les plateformes de streaming, les nouvelles formations avec ce genre de réputation se font rares.
Bienvenue au Mama Festival ! En quoi la France est spéciale pour vous ?
Julia Vroegh : On adore la France, car c’est l’un des pays dans lequel on tourne le plus. Les gens semblent nous adorer ici, on revient souvent. L’hospitalité est incroyable. En dehors des Pays-Bas, c’est vraiment le pays où on joue sur les plus grosses scènes. Je n’arrive pas à expliquer cet amour que la France nous porte. On a un super booker en France, on sent vraiment l’engouement grossir autour de nous.
Votre prochaine tournée est au Japon, le groupe semble très excité à l’idée d’y jouer quelques dates. En quoi ce pays a influencé votre musique ?
J.V : Notre batteur (Jim Luijten) est un énorme fan du Japon. Il y va tous les ans pour des séjours d’environ un mois. Il est presque bilingue en japonais. Parfois, il s’absente pendant deux heures pour aller prendre des cours dans un café. Personnellement, je ne sais pas quoi attendre de cette tournée, je n’y suis jamais allé et je ne connais pas grand chose de ce pays. Enfin, je connais la musique que Jim fait jouer dans notre van. Ils ont une scène punk assez importante là-bas.
Sur un plan personnel, tu as quitté récemment ton travail pour te consacrer pleinement à la musique, était-ce quelque chose dont tu avais peur et qu’est ce qui t’a poussé à le faire ?
J.V : Oui, c’est vrai, c’est tout frais. Je travaillais en tant que manager dans un restaurant qui accueille aussi beaucoup de concerts. C’est un lieu très cool à Rotterdam qui s’appelle Roodkapje, c’est là qu’on à enregistrer notre première session youtube. J’y travaillai depuis mes 18 ans, j’y suis resté 6 ans. Je devais être focus sur ce boulot 24 heures sur 24 ce qui n’est pas forcément compatible avec la quantité de tournée que l’on fait. Parfois, juste avant de monter sur scène, je recevais des messages urgents du genre “Le sous-sol est inondé ! ” ou “Je suis malade, quelqu’un peut-il me remplacer ? J’étais constamment au téléphone et j’enchaînais nos tournées avec le boulot sans jamais prendre de jours de repos.
Au bout du compte, ce n’était pas faisable, c’était frustrant d’être limité dans ce travail. Je suis aussi partie pour me consacrer pleinement à la musique, le boulot me limitait aussi dans mon investissement auprès du groupe. Ma patronne à été très compréhensive et était contente pour moi. C’est flippant sur le plan financier, mais j’attends de voir comment le groupe se développe.
Pour l’instant Tramhaus n’a pas sorti d’albums, juste des petits EPs, s’agit-il d’une direction artistique ou une volonté de coller aux codes du streaming moderne ?
J.V : Un peu des deux. On a commencé pendant le covid, ce qui n’est pas du tout conventionnel pour un groupe de musique. Avant même d’avoir pu jouer sur scène, on avait déjà assez de chansons pour un album. On a d’abord sortit un single (I don’t sweat) et quand on a commencé à jouer sur scène, on avait plein de chansons exclusives qu’on avait pas vraiment enregistrées. Aux Pays-Bas, on a beaucoup de problèmes pour faire presser des vinyles à cause de l’embouteillage causé par les grosses sorties et ça a empiré avec le covid.
On s’est dit que c’était plus pratique de sortir plusieurs petits projets afin de faire parler de nous et on souhaite aussi faire un album. Il y a aussi un peu de snobisme de notre part. On veut que notre premier album soit vraiment pensé comme un album pas juste une compilation de chansons écrites en l’espace de deux ans. On tend vers une cohérence artistique plus forte pour notre premier projet. On veut aussi se renouveler, car on tourne avec les mêmes chansons depuis longtemps.
Tu as découvert la basse à la toute première répétition avec le groupe. Quel est ton rapport avec cet instrument ?
Je n’avais jamais touché une basse avant Tramhaus. Je fais du piano depuis l’âge de 5 ans, j’ai appris beaucoup de musique classique et à lire des partitions. En grandissant, vers 11-12 ans, j’ai commencé à écouter du rock. J’ai essayé de me mettre à la guitare, mais dans ma petite ville d’origine, il n’y avait qu’un seul prof de guitare et il était très vieux, c’était pas du tout ce dont j’avais besoin. J’ai petit à petit tout arrêté, je me suis mise à écouter de plus en plus de musique, j’allais à des concerts.
Et un jour, on m’a dit “Maintenant, tu joues de la basse”. Je n’y avais jamais vraiment pensé avant, mais c’était comme une évidence. Je ne veux plus du tout changer d’instrument. Je pense que les autres membres de Tramhaus on vu en moi l’essence d’une bassiste et ils avaient raison, cet instrument me correspond tout à fait. Ça ne m’empêche pas de jouer du synthé sur certains morceaux du groupe. Je ne suis pas la seule du groupe avec un passé classique, notre guitariste jouait du saxophone dans un orchestre.
Il y a une sorte de résurgence du saxophone dans la scène post-punk, pensez vous en intégrer dans votre musique ?
On a déjà fait une session live de nos morceaux avec un saxophone, c’était très fun. C’est quelque part sur Youtube.
Vous vous apprêtez à jouer au festival Left of The Dial à Rotterdam, un festival avec lequel vous avez beaucoup d’histoires, quelles sont vos attentes ?
On travaille tous un peu sur le festival, on y avait joué une session en 2021, c’est une pierre angulaire de notre ville. On a une énergie folle quand on joue à Rotterdam, c’est totalement différent. Travailler sur le festival et s’absenter pour performer, c’est assez marrant. Cette année, on ouvre et on ferme le festival, c’est un honneur. On a pu choisir les salles dans lesquelles on va performer et on a choisi un sous-sol qui normalement n’accueille que des sets de techno. Il y a beaucoup d’attentes pour notre concert et pour ce festival. La ville est envahie de musiciens, tout ce qui peut faire office de scène devient une scène, c’est à la fois excitant et hyperactif, j’adore ce genre d’ambiance.
Comment vis-tu la transition entre spectatrices et musiciennes ?
J’étais photographe de concert avant sur mon temps libre. Je bossais pour des groupes ou des festivals. Aujourd’hui quand je vois des photographes devant mes concerts, je me rends compte à quel point les deux points de vues sont différents. Je pensais que j’allais être plus nerveuse que ça sur scène, mais je m’acclimate très bien à cet exercice. À vrai dire, je préfère, car j’ai un petit côté agoraphobe. Ce qui est frustrant, c’est de ne pas pouvoir s’entendre, j’adorerais assister à un de nos concerts.
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